En réalité, Bolton, Pompeo et les partisans de la guerre contre l'Iran recherchaient, dans l'application de la stratégie des pressions, des stratégies pour la mise en place des conditions de la réédition du scénario irakien de 2003 l Trump n'en voulait visiblement pas. Le limogeage de John Bolton le 10 septembre dernier a révélé la divergence d'approche entre le conseiller américain à la Sécurité nationale et le président Donald Trump sur le dossier iranien. Trump, qui souscrit à la stratégie des pressions maximales contre l'Iran pour lui arracher des concessions, s'inscrit en faux avec la ligne d'une confrontation militaire ouverte avec Téhéran, défendue par John Bolton et par le secrétaire d'Etat, Mike Pompeo. Jusque-là, la mise en œuvre de pressions économiques, financières et politiques, qui devaient favoriser une mise au pas de l'Iran en permettant une limitation sévère de son programme balistique, ou alors accélérer la dynamique de changement du régime en neutralisant les risques de conflit, s'est révélée plus dangereuse qu'efficace au regard des récentes évolutions. Sur le terrain, les développements de ces dernières semaines ont également montré que les Etats-Unis n'avaient pas totalement renoncé à l'usage de la force militaire, au contraire, l'intensification des attaques israéliennes en Syrie, en Irak et au Liban – bouleversement majeur depuis 2006 – s'inscrivait en réalité dans une division du travail confiant à Tel-Aviv la tâche de conduire la sale guerre, tandis que Washington tenterait par l'accentuation des pressions d'imposer de nouvelles conditions à l'Iran, comme l'affirme Steven Cock dans son article «Israel is doing all the dirty work against Iran» paru dans la revue Foreign Policy le 5 septembre dernier. Conflit de basse intensité La guerre de basse intensité se poursuit donc, comme le fait observer Daniel Larisson dans sa publication du 12 septembre «A Foreign Policy Pivot ? I wouldn't bet on it» dans the American Conservative, et rien ne prouve, selon l'auteur, que Trump a réellement l'intention d'apaiser les tensions avec l'Iran après le départ de Bolton. Néanmoins, il est clair que pour le président américain, plus rétif à l'approche militaire et davantage soucieux de la politique de l'image auprès de son électorat, l'option va-t-en guerre incarnée par Bolton en réaction à l'intransigeance iranienne serait non conforme à ses intérêts. En réalité, Bolton, Pompeo et les partisans de la guerre contre l'Iran recherchent dans l'application de la stratégie des pressions des stratégies maximales, la mise en place des conditions de la réédition du scénario irakien de 2003. Ronen Bergman, qui a récemment donné du crédit à cette hypothèse dans l'article «The secret history of the push to strike Iran» paru dans le New York Times le 4 septembre, explique que depuis 2003, les tenants d'une politique extérieure dominée par la défense des intérêts israéliens tentent de pousser à une intervention militaire contre l'Iran, mais cette option est loin de faire l'unanimité. Même en Israël, l'activisme croissant des décideurs politiques a provoqué de sérieuses tensions avec les responsables militaires qui, dans une perspective plus réaliste du rapport de force, considèrent qu'une guerre contre Téhéran ouvrirait une période d'indétermination aux conséquences redoutables. Les limites d'une stratégie La stratégie des pressions maximales montre de toute évidence ses limites dans un contexte où le processus de développement du potentiel balistique et militaire de l'Iran et de ses alliés se poursuit et se renforce. Le Hezbollah a, dans un premier temps, riposté à l'attaque israélienne à partir de la frontière libanaise, s'octroyant désormais une latitude optimale dans son action, avant d'abattre un drone israélien qui survolait le territoire libanais lundi. Le lendemain, un second drone israélien a été intercepté et détruit par la résistance palestinienne au-dessus de la bande de Ghaza. A la suite de ces actions, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a de nouveau rappelé dans un discours, mardi, la centralité du rôle de l'Iran au sein de l'axe de la résistance et très sérieusement mis en garde contre les répercussions qu'entraînerait l'éventualité d'une attaque militaire contre Téhéran. Une telle hypothèse ferait basculer le conflit de basse intensité vers une confrontation ouverte avec les Etats-Unis, Israël et leurs alliés régionaux. Ce discours réaffirme à la fois l'unité du camp de la résistance et sa capacité de dissuasion imposée par l'équilibre de la terreur.