La rumeur est persistante. On annonce, en effet, un changement à la tête de la Télévision nationale dans les prochains jours. Vrai ou faux ? Selon certaines indiscrétions, la nomination d'un nouveau PDG, qu'il faudrait prendre avec des pincettes, serait non dénuée de fondement si tant est que le secteur étatique de l'information est devenu un réel motif de préoccupation pour le gouvernement qui ambitionne, dit-on, de lui donner, toutes proportions gardées, une impulsion en adéquation avec les attentes du public, notamment la sphère la plus sensible, l'audiovisuel, qui a vraiment besoin de prouver qu'elle peut exister autrement. Ainsi donc, Abdelkader Leulmi serait sur un siège éjectable, au profit de… Azzedine Mihoubi (c'est le nom qui circule) qui passerait de la brève expérience de la radio où il a fait long feu à celle de la télévision, autrement dit dans un terrain beaucoup plus marécageux, plus compliqué en tout cas à partir du moment où les responsabilités, à quelque niveau qu'elles soient, demeurent toujours diluées dans le flot des injonctions qui viennent d'en haut et qui, par conséquent, paralysent tout esprit d'entreprise. Bizarre tout de même que celui qui vient à peine d'être dégommé pour « indiscipline protocolaire » du poste de ministre délégué de la Communication soit sur la liste pour une mission aussi redoutable. A moins que ce ne soit que pure spéculation propre au rituel du sérail à l'approche de la saison chaude. L'actuel patron de l'Unique, s'il aurait été dans le collimateur des décideurs, ce n'est pas tant pour avoir causé quelques soucis au système mais plutôt pour avoir un peu trop enfoncé la télévision dans un archaïsme qui la place carrément en marge de la société, alors qu'il était venu avec la ferme intention de redonner des couleurs à la boîte tout en restant dans le giron du pouvoir. Avant lui, HHC dans sa suffisance avait essayé, avec tout l'excès de zèle qui caractérisait ses actions, de « moderniser » à sa manière le petit écran, mais sans grands résultats. Entre ses convictions alambiquées, ses fausses promesses comme celle ayant trait à l'ouverture du champ audiovisuel et le diktat politico-idéologique auquel reste soumise la télévision, il n'y a pratiquement pas de place pour le romantisme. Elevé au poste d'ambassadeur pour service rendu malgré tout le vent qu'il a brassé autour de lui, il laisse quand même une institution à la dérive, minée par des problèmes de passe-droits et d'incompétence notoire. Avec toute la loyauté au système qui lui est reconnue et la rigueur qu'il a adoptée sur le plan purement de la gestion financière, on dira de Abdelkader Leulmi qu'il n'a pas réussi à avoir le feeling idoine pour rendre le petit écran plus attractif alors que les moyens humains et matériels mis à sa disposition sont loin d'être négligeables. Il a, certes, déployé beaucoup d'efforts pour couper la route aux producteurs véreux qualifiés de prédateurs pour leurs appétits voraces, mais d'un autre côté, le contenu de la programmation a connu une courbe déclinante qui a fait encore davantage fuir les téléspectateurs. Sous son règne, l'Unique a pour ainsi dire sombré un peu plus dans la platitude. La plupart des émissions phares, tombées en désuétude, ne suscitent plus d'émotions. Pour la majorité des Algériens qui rêvent d'avoir une télé audacieuse, d'un autre niveau culturel et artistique, c'est la grande désillusion. Une de plus… Cela dit, si Mihoubi qui n'a pas eu le temps suffisant pour faire « une autre radio », comme il le laissait entendre, et qui de surcroît n'a pas réussi à faire bouger les lignes de la communication, est réellement pressenti pour monter au boulevard des Martyrs, on se demande ce qu'il pourrait apporter de nouveau si tant est que le problème central de la Télévision nationale est un problème d'autonomie politique et non un problème d'hommes. Il faudrait donc des postulants qui auront le courage de remettre en cause l'ordre établi pour imposer leur vision novatrice ou réformiste sans trop choquer le sérail. Avec la venue comme ministre de la Communication de l'ex-DG de l'APS, rompu aux arcanes du système, faut-il espérer une redistribution des cartes dans le champ médiatique de l'audiovisuel ? Autrement dit, la radio et surtout la télévision auront-elles droit à un autre statut qui les libérera de la domination excessive du système politique pour les rendre plus entreprenantes dans leurs fonctions informatives et distractives ? Nacer Mehal, au cours de son installation, a eu cette phrase très significative : « Je suis un homme d'ouverture et de dialogue… ». Jusqu'à quelle limite pourra-t-il aller pour bousculer les vieilles habitudes si telle est son intention… Ou plus prosaïquement, sera -t-il, du haut de la pyramide d'où il scrute désormais l'horizon, capable de franchir les lignes rouges pour bien marquer son passage ? Entre-temps, la télé nationale ne semble nullement inquiète des pseudo-bouleversements qui pourraient se manigancer sur son dos. A voir la tête de son présentateur vedette du JT de 20 h, on se dit finalement que rien de bien grave ne peut lui arriver tant que les gardiens du temple restent vigilants.