Une rumeur est une rumeur, certes, mais il y a aussi l'adage qui dit qu'il n'y a jamais de fumée sans feu... On veut ici parler des petits bruits de coulisses qui ont couru, et qui se font toujours persistants quant à l'avenir de HHC à la tête de la Télévision nationale. Est-il partant, comme on le laisse sous-entendre à l'intérieur même des murs de l'Unique ? Ou s'agit-il d'un nouveau ballon-sonde, lancé à bon escient, pour savoir si le système hamraouiste a encore de beaux jours devant lui. Car, au-delà de la personne du PDG de l'ENTV qui, quoi qu'on en dise, a marqué de son empreinte, pendant une dizaine d'années, le média le plus « stratégique » d'Algérie, c'est effectivement le devenir de la Télévision nationale en tant qu'institution étatique et de ses rapports avec les citoyens qui sont aujourd'hui plus que jamais en débat, à l'heure précisément où, dans les hautes sphères politiques, l'on insiste sur les grandes perspectives « d'ouverture » et de changement qui seront introduits par la révision de la Constitution. Un débat qui n'est pas dans la rue, c'est-à-dire pas ouvert aux Algériens, mais qui pose cette vraie question : la Télévision nationale peut-elle continuer indéfiniment à n'être qu'un vulgaire instrument de propagande pour assurer la survie carriériste des gouvernants, ou franchira-t-elle enfin le pas pour se mettre à jour avec son temps et donc assumer en toute indépendance son statut de moyen de communication au service exclusif de l'émancipation sociale, culturelle, de la société ? Quand les services spécialisés de l'Unique tendent les micros aux citoyens pour savoir si ces derniers sont satisfaits de leur télé, à 90% ils ont les réponses qu'ils espèrent. Les hommes et les femmes, jeunes et moins jeunes, toutes catégories sociales confondues, ont presque la même réaction devant la caméra : « C'est bien ce que fait notre télé, mais elle peut encore s'améliorer... » Des réponses langue de bois, certes, sincères pour la plupart mais qui restent évasives, sans contenu réel pour la réflexion, à partir du moment où les gens auxquels on demande un avis savent à l'avance pertinemment que la critique n'est pas la bienvenue dans la boîte. La règle étant de surcroît que pour passer il vaut mieux aller dans le sens du poil. En revanche, pour les responsables du boulevard des Martyrs, l'optimisme des Algériens sondés au pied levé, qui ne représentent qu'eux-mêmes, reste cependant un critère de jugement suffisant pour se donner bonne conscience et se dire que si finalement les programmes sont acceptés sans trop de heurts par les téléspectateurs, c'est que la télé nationale n'est pas aussi mauvaise, aussi médiocre qu'on le laisse croire. Les sondages d'opinion effectués à grande échelle et sollicités auprès de sociétés expertes en la matière confirment cette tendance à l'auto-encensement qui au lieu de faire réagir l'institution, a pour effet dévastateur de gripper encore davantage la machine. En fait, c'est dans un univers hypocrite qu'évolue le système télévisuel, et par extension tout le champs audiovisuel étatique, un univers où ce qui est noir doit forcément être recouvert de la couleur blanche. Les téléspectateurs qui trouvent, devant la caméra, que l'Unique est une télé acceptable, se mentent à eux-mêmes pour la plupart, car hors champ, ils pensent le contraire de ce qu'ils affirment puisqu'ils sont tout autant que les autres atteints de la maladie du zapping. Les responsables de l'institution, de leur côté, qui multiplient les déclarations triomphalistes pour plaider la bonne cause de leur protégée, savent au fond d'eux-mêmes que la télévision algérienne, en dépit de tous les efforts qu'elle fait pour s'affranchir de la médiocrité, n'arrive toujours pas à être performante aux yeux des Algériens. Qu'à cela ne tienne, les enjeux étant ailleurs, il est hors de question de réformer ou de refonder quoi que ce soit. Cela pour souligner encore une fois que le système mis en place et défendu avec un zèle incomparable par HHC n'admet aucun changement qui puisse remettre en cause la relation privilégiée qui existe entre la télé et le Pouvoir politique. En tout état de cause, si le départ du PDG de l'ENTV se confirme, la lecture la plus plausible serait qu'il s'agirait d'une affectation pour une autre mission et non d'un limogeage qui ne dit pas son nom pour manquement à son devoir. Car comme serviteur infaillible du concept télévisuel tel que le définissent nos dirigeants, on ne trouvera pas mieux... HHC a, en effet, encore davantage idéalisé la télé d'Etat, en lui donnant plus de consistance dans la servitude et la soumission envers les impératifs de la gouvernance bouteflikéenne. Il a d'ailleurs lancé bien avant l'heure la campagne de la prochaine présidentielle au profit exclusif de la réélection de Bouteflika. Qui peut contester cette option ?