Les jours se suivent et les événements se multiplient sans pour autant apporter du nouveau à la situation politique nationale. Les discours quasi quotidiens du chef d'état-major de l'armée nationale, à travers les différentes casernes du pays, sont à chaque fois contredits par les étudiants lors de leur journée de protestation hebdomadaire, puis par l'ensemble de la population acquise aux revendications du hirak et qui bat le pavé chaque vendredi depuis presque huit mois. Il est même perceptible que le fossé s'élargit davantage au fil du temps entre les tenants du pouvoir réel arc-boutés sur leur propre feuille de route et le peuple déterminé à tout changer des lois de la gouvernance passéiste et de ses hommes compromis. «Yetnahaw gaâ» est le slogan qui résume cette volonté populaire à faire table rase du système tentaculaire qui façonnait, à sa guise, le destin du pays depuis l'indépendance. Fort de son expérience principalement pétrie dans le mensonge, la trahison, l'échec et la corruption, le commun des Algériens ne croit plus à ce qui vient d'en haut et ne fait plus confiance à ce que l'on décide à sa place. Et encore plus sous la contrainte ou la menace. Le destin de l'élection présidentielle prévue pour le 12 décembre prochain dépend alors de cette dialectique. Le peuple ira aux urnes au moment où il se sentira maître de son avenir. Et pour se convaincre de ce statut tant rêvé, il doit se sentir libre d'exprimer son opinion, il doit se sentir confiant en la justice qui protège ses droits en toutes circonstances. Comme il doit évidemment être certain que son opinion aura l'attention qu'elle mérite. C'est autant de travail didactique que les tenants du pouvoir doivent entreprendre en direction du citoyen pour espérer gagner le pari des élections prochaines. Toute autre surenchère basée sur la force ou la ruse compliquera davantage la situation on ne peut plus précaire du pays. Le superflu, ponctué par des arrestations toutes aussi ridicules que spectaculaires des décisions contreproductives, car beaucoup plus provocatrices qu'apaisantes, doit laisser place à l'essentiel dirigé vers le seul objectif de placer le pays sur la voie de la modernité, guidé par des institutions confiées à des mains jeunes et compétentes. Tout le monde s'accorde à dire que tout est encore possible, si la volonté de bien agir l'emporte sur l'ego des uns et des autres et sur les calculs à fort intérêt personnel ou clanique.