Désillusion, exacerbation, regrets… Les Algériens semblent avoir du mal à digérer la dure défaite du onze national face à la modeste équipe slovène. Ils sont presque unanimes à critiquer, aussi bien dans les forums sur Internet que dans des discussions dans les cafés et autres lieux publics, les « choix » de l'entraîneur Rabah Saâdane et son « excès de prudence » face à un adversaire prenable. « Je ne m'attendais pas à une telle défaite, surtout après avoir vu la première mi-temps. Je n'arrive pas à croire qu'on a perdu ce match qui était vraiment à notre portée. Saâdane est pour moi le premier responsable de cet échec », fulmine Djamel, buraliste. « Nous étions près du but. Nos joueurs ont su dominer la rencontre, créer des occasions, faire circuler le ballon. Bref, ils ont joué et donné tout ce qu'ils pouvaient. Ils ne méritaient pas de perdre », regrette Sofiane, cadre dans le secteur de la communication. Il estime que les changements opérés par l'entraîneur lors de la seconde mi-temps ont faussé la partie. « On ne laisse pas un talentueux joueur de 20 ans comme Boudebouz sur le banc de touche et faire entrer un joueur de 36 ans. C'est illogique ! », peste-t-il. « Franchement, les joueurs n'ont pas à rougir de leur prestation. Ils se sont donnés à fond. Mais le coach n'a pas apporté les ajustements nécessaires pour vaincre une prenable équipe slovène qui n'a rien montré durant le match. J'en veux à Saâdane qui n'a pas su faire le bon choix. Il aurait dû remplacer Ziani par Boudebouz qui aurait stimulé l'attaque et donner de bonnes balles à Djebbour », R. Hichem, qui tient une boutique de vêtements à Alger-Centre. « Je m'attendais à ce qu'on gagne ou au moins à un match nul. Mais la chance a mal tourné. Les joueurs n'ont pas péché. C'est la faute au coach dont l'apport attendu en seconde période était nul. Je pense que lorsque quelqu'un n'a plus rien à donner, il faut savoir le remercier », soutient Slimane, retraité. La tactique de jeu a été également critiquée. « Saâdane est parti avec l'esprit défensif de 1986, alors qu'en 2010 les choses ont nettement changé. La place est actuellement à l'offensive. Comme on dit, la meilleure défense, c'est l'attaque », résume Rabah, ingénieur dans les télécommunications. D'autres fans des Fennecs évoquent la mauvaise préparation de l'équipe nationale, notamment sur le plan psychologique. « La défaite n'est, à mon sens, guère une question technique ou tactique. Il faudrait se pencher sur l'aspect psychologique qui semble négligé par la direction de l'équipe nationale. Les joueurs sont tous à leur première compétition mondiale. Certains sont à leur première sélection en équipe nationale. Ils n'étaient pas préparés sur le plan psychologique, élément très important sur lequel repose le succès collectif et individuel de toute une équipe », analyse Karim, un étudiant en psychologie à l'université de Bouzaréah. Ce jeune étudiant se dit certain que pour bien entamer une compétition comme la Coupe du monde, il faut un mental de fer et un comportement exemplaire. Ce qui est difficile avec la pression qu'il y a sur les joueurs. C'est pour cela qu'il fallait, selon lui, donner suffisamment d'importance à cet aspect dans la préparation. « La sanction et l'expulsion de Ghezzal auraient pu être évitées, s'il avait bien été préparé psychologiquement », ajoute-t-il, sans pour autant cacher sa frustration, après la défaite des Verts. Ahmed, chauffeur de taxi, se dit, quant à lui, pas surpris de la défaite : « A quoi faut-il s'attendre, quand on a le championnat national le plus terne et le plus nul d'Afrique. Bien que je l'aime et je la soutiens, notre équipe nationale est presque totalement importée, comme on importe tout ce que nous consommons, des allumettes jusqu'à la tomate. » Pour d'autres supporters, être présent dans cette compétition footballistique de haut niveau, c'est déjà un exploit. « Il y a deux ans, nous n'avions pas d'équipe et nous n'espérions même pas nous qualifier en Coupe d'Afrique. Aujourd'hui, nous sommes présents dans le premier Mondial qui se joue sur notre continent. C'est une bonne chose. Il ne faut pas espérer beaucoup d'une équipe qui n'existe que depuis deux ans », relève Mahieddine, agent immobilier. Après la dure défaite contre la Slovénie, les Algériens, déjà sceptiques, perdent totalement espoir et ne croient plus en les capacités des Verts à réaliser un quelconque exploit lors de ce Mondial. « S'ils n'ont pas arraché, ne serait-ce, un match nul contre la Slovénie, je vois mal comment ils pourraient faire quelque chose contre l'Angleterre, une des équipes favorites de ce Mondial. J'espère seulement qu'ils ne seront pas humiliés comme l'Australie qui a perdu 4 à 0 face à l'Allemagne », souhaite Mustapha, cadre des finances. Ainsi, pour les Algériens, les Fennecs ont compromis leurs chances de passer au second tour. Il est temps pour Saâdane et ses protégés de plier bagage…