Les Africains et leur allié français ont plaidé, lundi lors d'un sommet à Pau du G5 Sahel, pour un appui renforcé des Européens encore frileux à s'investir pleinement dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Ce sommet s'est tenu au lendemain de l'annonce des pires pertes subies par l'armée nigérienne, jeudi, dans une attaque jihadiste : 89 soldats tués, dans le camp de Chinégodar. Confrontés à une escalade des attaques djihadistes, les présidents de cinq pays sahéliens et Emmanuel Macron ont convenu lundi de renforcer leur coopération militaire contre les terroristes. Et comme le leur réclamait le président français Emmanuel Macron, les dirigeants des pays du G5 Sahel qu'il avait conviés à Pau, dans le sud-ouest de la France, ont signé une déclaration commune où ils ont exprimé le souhait «de la poursuite de l'engagement militaire de la France au Sahel». Une réponse très attendue par Paris à la montée du sentiment anti-français, en particulier au Mali et au Burkina. Les participants ont également convenu des évolutions stratégiques de la lutte anti-terroriste, concentrant leurs efforts sur certains points, augmentant les efforts de formation des armées du Sahel et appelant tous les pays et partenaires souhaitant contribuer à participer à une «Coalition pour le Sahel». Alors que les Etats-Unis envisagent un désengagement de leurs troupes en Afrique, les pays du G5 Sahel ont aussi exprimé leur «reconnaissance à l'égard de l'appui crucial apporté par les Etats-Unis et ont exprimé le souhait de sa continuité». «C'est un allié important que nous devons sauvegarder», a insisté le Burkinabè Roch Kaboré, président en exercice du G5 Sahel. Leur désengagement «serait une mauvaise nouvelle pour nous», a renchéri Emmanuel Macron. «J'espère pouvoir convaincre le président Trump que la lutte contre le terrorisme se joue aussi dans cette région», a-t-il déclaré. Paris renforce Barkhane Pour démontrer la détermination de la France à rester au Sahel, Emmanuel Macron a annoncé l'envoi de 220 hommes supplémentaires, qui viendront renforcer les troupes françaises de Barkhane, déjà fortes de 4500 hommes. Concernant les critiques visant les soldats français dans la région émanant d'une partie des opinions publiques africaines, il a assuré avoir été pleinement rassuré sur ce point par ses homologues africains. Interrogé par un journaliste malien qui rapportait les doutes d'une partie de la population de son pays sur les raisons de la présence militaire française, Emmanuel Macron a dénoncé avec colère les discours antifrançais. Dans une possible allusion notamment à la Russie, le président français a dénoncé : «Les discours que j'ai pu entendre ces dernières semaines sont indignes» parce qu'ils servent d'autres intérêts, «soit ceux des groupements terroristes, soit ceux d'autres puissances étrangères qui veulent simplement voir les Européens plus loin, parce qu'elles ont leur propre agenda, un agenda de mercenaires». «Moi je sais qui est tombé pour la sécurité des Maliennes et des Maliens, des Nigériens et des Burkinabè : des soldats français», a-t-il martelé, en référence aux 41 militaires français tués au Sahel depuis 2013. Le président français et ses homologues africains – Roch Marc Christian Kaboré (Burkina Faso), Ibrahim Boubacar Keïta (Mali), Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani (Mauritanie), Mahamadou Issoufou (Niger) et Idriss Déby (Tchad) – ont surtout décidé de davantage coordonner leur action militaire en la concentrant sur la zone des trois frontières (Mali, Niger, Burkina), et en visant en priorité l'Etat islamique au Grand Sahara (EIGS). Cette coordination s'effectuera «sous le commandement conjoint de la force Barkhane et de la force conjointe du G5 Sahel», précise la déclaration commune, qui évoque aussi des mesures pour restaurer la présence de l'Etat, des administrations et des services publics dans de vastes zones où elle n'est plus, notamment au Mali, et la poursuite des efforts en matière d'aide au développement, un des autres axes stratégiques du G5. Selon l'ONU, plus de 4000 personnes ont été tuées dans des attaques terroristes en 2019 au Burkina Faso, au Mali et au Niger.