Echanges acerbes entre l'ancien président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Saïd Sadi, et le patron du parti Jil Jadid, Soufiane Djilali, après l'annonce, par ce dernier, de la libération prochaine des détenus politiques Karim Tabbou et Samir Benlarbi. Saïd Sadi a usé de sa plume pour vitupérer le leader d'un parti qui appartient, pourtant, à la même mouvance «démocratique». Saïd Sadi a qualifié Soufiane Djilali de «satellite du régime» et de «télégraphiste des despotes», en «perpétuant et cultivant l'abus». Selon lui, l'initiative du président de Jil jadid mérite d'être analysée posément, dans la mesure où elle renseigne sur les intentions prochaines du pouvoir. Dans un message publié sur sa page Facebook, Saïd Sadi dénonce le fait que «les satellites de régime» s'autorisent à révéler, avant que la justice ait statué, l'élargissement des citoyens privés de liberté pour avoir émis une opinion jugée non conforme à la «doxa officielle dans le pays». L'ex-patron du RCD s'est dit stupéfait de voir certains, allusion à M. Djilali, présenter la fin d'une détention arbitraire comme un signe d'apaisement sinon un acte de générosité, ce qui suggère que ces détenus ont mérité leur emprisonnement. «Cette structure mentale dévoile une méthode de gouvernance qui en dit long sur la conception de la citoyenneté que se font les détenteurs du pouvoir», critique Sadi, qui soutient que pour «les potentats du système militaro-policier» et «leurs courtisans», la vie du citoyen dépend de la magnanimité du prince. «Les ambassadeurs qui relaient cet arbitraire n'ont d'ailleurs pas forcément conscience qu'en jouant les télégraphistes des despotes, ils cultivent et perpétuent la pratique de l'abus», assène Sadi, précisant que pour celui qu'il qualifie de «courtisan» «l'Algérien détenu illégalement n'a droit ni à des excuses ni à des réparations dès lors qu'il a osé défier l'autorité toute puissante». Sadi pense qu'il est préoccupant de voir une «partie de l'opinion accepter de loger dans les rangs de l'opposition des acteurs qui assurent le service après-vente d'archaïsmes politiques dignes du Moyen-Age». Ceci dans le fond ; dans la forme, Sadi relève un vice procédural lié à l'annonce de la libération des deux détenus alors qu'ils ne sont pas encore définitivement condamnés, comme l'exige la loi. Le chef de l'Etat, écrit Saïd Sadi, dispose certes du droit de grâce qu'il peut exercer une fois la condamnation prononcée, «mais il ne peut en aucune manière interférer dans une action de justice en cours, ce qui est le cas en l'occurrence». Saïd Sadi estime que «l'institution judiciaire n'avait pas besoin d'une démonstration aussi grotesque pour mériter son surnom de scribe d'ordres téléphonés». Sadi a saisi cette occasion pour rappeler que «l'esprit de la Soummam, qui a assumé l'universalité, est à l'ordre du jour» et que le choix qui s'offre à l'Algérie est entre la «Soummam et la dictature, militaire ou théocratique». Face à ces critiques, Soufiane Djilali est sorti de son silence et n'a pas mâché ses mots. Il réplique par trois tweets et promet d'autres réactions si Saïd Sadi s'aventurerait à répondre. Dans son premier tweet, il écrit : «Vous aussi dans la meute M. Sadi ? Pourtant, avec votre passé, vous devriez avoir un peu de pudeur», avant d'asséner à l'adresse de l'ancien président du RCD : «Télégraphiste ? M. Sadi, je vous rassure, je ne convoite pas votre spécialité, même si elle vous a permis une belle fortune !» Enfin, Soufiane Djilali termine sa réponse en soulignant la différence entre lui et Saïd Sadi : «M. Sadi, la différence entre vous et moi, c'est que vous avez toujours attisé le feu, quand moi j'ai toujours essayé de l'éteindre…»