L'industrie pharmaceutique mondiale fait l'objet de critiques acerbes et voit son capital de crédibilité profondément entamé, suite à une succession de fautes médicales graves enregistrées ces dernières années. De nombreux produits lancés avec un luxe de tintamarre publicitaire et d'euphorie, utilisés par des centaines de millions d'hommes à travers le monde, se sont avérés exceptionnellement dangereux pour la santé, comme le démontrent nombre d'accidents survenus dans différents pays. Dans l'une de ses dernières éditions, Le Nouvel Observateur a publié la synthèse d'une enquête explosive mettant à nu la « mécanique » de la commercialisation de ces produits mis sur le marché, souvent dans des conditions très peu « transparentes » et peu sûres. La multiplication d'accidents sanitaires et leur connaissance par le public ont forcé certaines entreprises géantes de la pharmacopée à retirer leurs produits. C'est le cas de médicaments « vedettes », tels que le Staltor (anticholesterol), le Vioxx (anti-inflammatoire), le Deroxat (antidépresseur) et bien d'autres. La firme Bayer (allemande), productrice du Staltor (également commercialisé sous le nom de Cholstat), a dû retirer en catastrophe son médicament après avoir constaté 52 décès dans plusieurs pays. Mais ses ennuis judiciaires ne font que commencer. Quelque 7169 patients dans le monde ont décidé de le poursuivre en justice. Déjà plus de 1 milliard de dollars ont été dépensés par la firme pour régler près de 3000 cas à l'amiable. D'autres procès sont envisagés contre d'autres entreprises de production pharmaceutique, qui promettent d'être autrement plus bruyants. Le Vioxx a été condamné à la retraite, cinq ans après son lancement, en raison de ses risques cardiovasculaires. Le Celebrex, son principal concurrent commercialisé par Pfizer, est lui aussi sur la sellette parce qu'il multiplierait par deux fois et demie la probabilité d'attaque cérébrale et cardiaque. Le vaccin contre l'hépatite B est suspecté d'avoir un lien avec l'apparition de la sclérose en plaques. Quant au traitement hormonal substitutif de la ménopause (THS), il favoriserait le cancer du sein et des thromboses. Récemment encore, Eli Lilly, une firme géante connue pour ses performances, a été accusée par le British Medical Journal d'avoir passé sous silence des statistiques qui montrent que son antidépresseur augmenterait les pensées suicidaires et les actes de violence. Les laboratoires dissimulent-ils les dangers de leurs médicaments pour mieux les vendre ? « Un labo n'est pas une œuvre de bienfaisance, mais une entreprise qui a pour but, comme les autres, de maximiser ses profits », répond un expert judiciaire, Marc Girard, auteur d'un rapport sur l'anticholestérol Staltor. Pour lui, des sommes colossales sont investies dans la recherche et chaque molécule coûte la coquette somme de 800 millions d'euros, en moyenne. C'est pour ne pas perdre tout cet argent investi que les firmes pharmaceutiques semblent fermer l'œil devant les anomalies constatées, une fois le produit commercialisé. Quant aux scientifiques chargés du contrôle, ils ne sont indépendants qu'en apparence. Leur rôle est d'aider à promouvoir le produit et non à le détruire. Ils sont invités à faire preuve de « modération », jusque dans leur langage, en remplaçant, par exemple, l'expression « tentative de suicide » par « overdose » ; « idées suicidaires » par « dépression », etc.