La question de l'exploitation du gaz de schiste revient sur la scène médiatique à la faveur de la récente déclaration du ministre de l'Energie, Abdelmadjid Attar. En réponse aux questions de l'APS, M. Attar a souligné qu'avec les «réserves prouvées restantes actuellement et l'augmentation de la consommation intérieure, la compagnie nationale Sonatrach devra réduire ses exportations à compter de 2025, pour ne plus exporter à partir de 2030, et non 2025, qu'entre 25 à 30 milliards de mètres cubes». Le nouveau ministre de l'Energie et ancien PDG de Sonatrach soutient qu'il y a nécessité «d'explorer, d'améliorer les taux de récupération et pourquoi pas aller au gaz de schiste, si c'est nécessaire à cause des besoins intérieurs au-delà de 2030». Une suggestion qui ouvrira certainement le débat sur cette question sensible qui avait, pour rappel, suscité des soulèvements populaires, notamment dans la région du Sud par crainte des conséquences de l'application des techniques de fracturation hydraulique sur la nature, notamment sur l'eau souterraine. Rappelons qu'au tout début de son mandat, le président Tebboune avait évoqué le recours à l'exploitation du gaz de schiste comme secours face à la raréfaction de la ressource fossile conventionnelle. Une déclaration qui avait soulevé moult indignations et qui a été suivie par un rectificatif de la part de Abdelmadjid Tebboune à travers une interview accordée au média russe Russia Today. «Je n'ai jamais dit que nous allions exploiter le gaz de schiste... J'ai simplement relevé, chiffres à l'appui, que le développement et la croissance de l'Algérie nous ont amenés à consommer la moitié de notre production gazière» avait-il soutenu en notant que «la décision est subordonnée aux conclusions des experts, ce sont eux les spécialistes». M. Tebboune avait aussi affirmé que la première expérience de l'Algérie dans ce domaine a été une erreur, car «nous avons un vaste Sahara mais nous sommes allés à In Salah». «La décision de l'exploitation du gaz de schiste était venue par surprise et les citoyens n'étaient pas préparés à l'exploitation de ce gaz, ce qui a donné lieu à des interprétations» soutenait-il en février dernier, assurant que les essais de l'exploitation de ce gaz polémique se feront dans le calme. «Si nous voulons élever le niveau de vie, cette richesse doit être exploitée... L'exploitation du gaz de schiste nécessite un débat national», affirmait le Président. La récente déclaration de Abdelmadjid Attar ouvre donc ce débat qui va très certainement déchaîner les passions, d'autant que les résultats de l'exploitation du schiste aux Etats-Unis ne font pas l'unanimité. Des pays européens, comme la Grande-Bretagne, ont renoncé à des projets d'exploitation du schiste, alors que d'autres ont carrément interdit de tels essais sur leurs territoires. Aux Etats-Unis, certains gisements sont à l'arrêt du fait de la complexité du procédé d'extraction du gaz de schiste ,mais aussi du très faible rendement. Dans sa déclaration, M. Attar a été prudent en évitant le ton affirmatif et ajoutant un «pourquoi pas» permettant le doute, même si la nouvelle loi sur les hydrocarbures permet le recours à cette exploitation. Il y a une semaine, le PDG de Sonatrach a été plus explicite en notant que «le programme identifié pourrait permettre de produire un volume annuel de 20 mds de mètres cubes de gaz à l'horizon 2030 et de créer 15 000 emplois directs». Toufik Hakkar précisera en outre qu'il s'agit «d'une industrie complexe qui nécessite plusieurs conditions pour être viable à long terme, telles que les capacités logistiques, la maîtrise des coûts et la gestion des risques et impacts environnementaux». Le même responsable précise que des études sont nécessaires pour réunir toutes les conditions de succès au développement de ces ressources et à suivre attentivement les progrès technologiques liés à leur exploitation. «Le passage à la phase d'exploitation ne peut être envisagé avant de pouvoir confirmer le potentiel et de s'assurer de la maîtrise totale des opérations et des impacts environnementaux» assure le PDG de Sonatrach. Ceci rend la perspective de recours au schiste bien éloignée et relance tout de même le débat sur la nécessité de gaspiller l'argent public dans ces études au lieu de penser à développer des secteurs comme l'agriculture et le tourisme plus rentables à court terme.