La corruption, le gaspillage et le mauvais choix des projets, les Algériens en savent quelque chose. Des projets d'infrastructures de piètre qualité ont dû nécessiter plus de temps et d'argent parce que les dirigeants en ont voulu ainsi. Ce sont bien entendu des nids de corruption généralisée pour les régimes honnis de la mauvaise gouvernance. «Les investissements publics accouchent trop souvent d'infrastructures onéreuses, de piètre qualité et peu utiles aux populations et à l'activité économique. Il s'agit souvent de projets de long terme, complexes et de grande envergure, qui constituent un terrain propice à la corruption, aux retards et aux dépassements de coûts. Il est indispensable de disposer de régimes solides de gouvernance pour limiter ce gaspillage des deniers publics.» Tel est l'amer constat auquel est arrivée l'étude du Fonds monétaire international (FMI) pour mieux «renforcer la gouvernance des projets d'infrastructures pour ne plus gaspiller l'argent public». En Algérie, les exemples sont légion. Les grands projets, comme l'autoroute Est-Ouest, la Grande Mosquée d'Alger ou la construction de logements, ont connu plusieurs rallonges budgétaires. «D'après nos travaux, note le FMI, certains dysfonctionnements conduisent les pays à gaspiller en moyenne un tiers de leurs dépenses d'infrastructures. Dans certains pays à faible revenu, cette proportion atteint des niveaux vertigineux, jusqu'à 50%.» Ainsi, le FMI considère que ces pays gaspillent, en pure perte, entre 30 et 50% de l'argent qu'ils consacrent aux infrastructures. Selon ses estimations, les pays avancés gaspillent 15% du montant des projets, contre 34% pour les pays émergents et 50% pour les pays en voie de développement. Cela traduit d'autant les niveaux de perte d'efficacité dans la conduite des projets. Bien réalisée, la relance de la demande globale par l'investissement public, selon cette institution de Bretton Woods, peut favoriser une croissance plus inclusive, réduire les inégalités et donner à chacun les moyens de la réussite économique. Mais nul doute que ces conditions sont nécessaires pour un redressement économique dans les pays où la mauvaise gouvernance est érigée en règle. Parfois, le mal est tellement enfoui dans les mœurs que cela nécessite surtout une refonte du système politique, qui a vu prospérer ces pratiques répréhensibles et condamnables. En gros, le FMI affirme qu'investir c'est bien, mais «réfléchir à la manière la plus judicieuse de dépenser l'argent public», c'est mieux. «Notre ouvrage s'appuie sur les analyses du FMI et sur ses activités dans le domaine du développement des capacités, et notamment sur les Evaluations de la gestion des investissements publics (EGIP) menées dans plus de 60 pays ; il propose une feuille de route pour aider les pays à passer des aspirations à l'action», note l'étude en question. Ainsi, ces ressources mal employées, comme en ces temps de crise sanitaire notamment, à cause de la pandémie mais pas seulement, représentent «un potentiel considérable» que les pays doivent exploiter pour redresser leurs économies sinistrées. «Fort heureusement, la gabegie et les dépenses inutiles dans des projets d'infrastructures ne sont pas une fatalité. D'après nos estimations, la consolidation des régimes de gouvernance des infrastructures pourrait permettre d'éviter plus de la moitié de ces pertes», note le Fonds monétaire international.