Le président de la République est revenu avant-hier, le temps d'un discours prononcé devant les cadres de la nation, sur sa conception de la réconciliation nationale et sa suite logique, l'amnistie générale. La concrétisation de ces deux options se fera, selon le chef de l'Etat, parallèlement à la poursuite de la lutte antiterroriste. « Ce devoir me commande de ne ménager aucun effort possible pour hâter la consolidation pleine et entière de la sécurité et de la paix civile dans notre pays, en œuvrant pour le renforcement de la lutte contre le terrorisme qui nous agresse collectivement, mais en revenant également à vous, le moment venu, lorsque les conditions seront réunies, pour proposer à votre décision souveraine le choix de l'amnistie qui rallie déjà votre soutien », a-t-il déclaré. M. Bouteflika qui se défend, ainsi, de vouloir décider à la place du peuple a, cependant, laissé entendre que l'amnistie ne sera pas synonyme d'amnésie. « Impossible de laisser ceux qui ont égorgé, violé et détruit le pays émerger encore une fois sur la scène politique (...) Ces gens-là ont, toutefois, le droit au pain, à l'eau et à l'oxygène », a-t-il souligné. L'allusion renvoie, bien entendu, aux anciens dirigeants du parti dissous qui espèrent, à la faveur de l'amnistie générale, reconquérir leurs droits civiques et réinvestir le terrain politique. « Il faut combattre le terrorisme quelle que soit sa forme, et ce, par le travail culturel, économique, social et surtout par le dialogue politique », a-t-il affirmé non sans reconnaître, par ailleurs, que « le dialogue avec ceux dont le passé est lourd vis-à-vis de la société algérienne est difficile à faire ». Une telle décisionnécessite, selon M. Bouteflika, l'approbation préalable du peuple. Le Président, qui s'est déclaré avoir tout fait durant ses six années de règne pour « éteindre les feux de la fitna », s'est félicité de « la restauration de la paix civile ». Cela n'a été possible, selon lui, que « grâce aux sacrifices des forces de sécurité (...) et aux bienfaits de la concorde civile, aussitôt transformée en dynamique de réconciliation nationale ». La sécurité et la paix civile Dans ce contexte, l'orateur a porté le bilan de ce qu'il appelle désormais « tragédie nationale » à 200 000 morts après avoir parlé - c'était à la veille de la célébration du 50e anniversaire de la Révolution - de 150 000 morts. Néanmoins, cette réconciliation, a-t-il affirmé, « ne saurait être réduite à un slogan ». Elle doit, selon lui, aboutir « à nous accepter tous et définitivement dans nos différences d'opinion, sans exclusion aucune, dans le cadre de la Constitution et des lois de la République ». Continuant son discours laudatif sur les vertus de la réconciliation nationale, le Président a estimé que « cette réconciliation avec nous-mêmes et avec notre pays aura réellement abouti lorsque chacun de nous veillera pleinement à assumer ses devoirs, tous ses devoirs de citoyen, en même temps qu'il revendiquera la satisfaction de ses droits ». Abordant le volet lié à la coopération internationale dans le domaine de la lutte antiterroriste, M. Bouteflika a indiqué que l'Algérie ne devra compter que sur ses moyens pour faire face à ce fléau. « Dans ce cadre, nous ne devons compter que sur nous-mêmes, sur notre volonté et sur notre engagement, c'est là un enseignement que je tire chaque jour de l'observation du monde, même si nous serons toujours, pour notre part, un partenaire loyal dans la solidarité internationale contre le terrorisme, dans le cadre pertinent des Nations unies et loin de toute démarche qui reviendrait à une confrontation des civilisations ou à une atteinte aux nobles valeurs de l'Islam », a-t-il déclaré. Mettant à profit le capital expérience de l'Algérie dans le domaine de la lutte antiterroriste, le chef de l'Etat s'est enorgueilli que notre pays soit devenu le conseiller avisé que tout le monde consulte. « Il faut qu'il y ait un échange de renseignements avec nos partenaires. On n'est pas à leur service et on n'est mobilisés que pour l'Algérie, sans plus », a-t-il observé. Le discours tranchant de M. Bouteflika laisse entendre que les partenaires de l'Algérie dans ce domaine refusent quelque part de renvoyer l'ascenseur. M. Bouteflika a plaidé, par ailleurs, pour une impérative définition universelle de ce fléau redouté par le monde entier. « Sur la scène internationale, chacun a un terrorisme à combattre », a-t-il conclu, pour dire certainement que derrière la lutte antiterroriste, chaque pays a des intérêts à sauvegarder.