Depuis quelques semaines, plusieurs quartiers et communes sont encombrés de déchets ménagers. Une impression que le ramassage et la collecte des ordures se fait à un rythme plus ralenti. Reportage. A l'intérieur de la cité Gregory à Jolie Vue à Kouba, un petit rond-point, généralement peu respecté est «transformé», ces derniers jours en «petite décharge» pour le quartier. Une montagne de sacs-poubelles et cartons s'entassent depuis des jours. «C'est vrai que nous sommes habitués à ce genre de décor, mais depuis quelques semaines, la situation se dégrade de plus en plus ? Trottoirs, entrées de bâtiment et autres espaces sont chargés d'ordures», nous raconte une maman, venue récupérer sa fille de l'école primaire sise juste à côté de cette nouvelle décharge. Partout par ailleurs, à quelques exceptions près, le décor est presque le même. Des bacs à ordures pleins à craquer pendant la journée, des rues encombrées de déchets managers. Le ramassage des ordures se fait, selon certains habitants, «très rares ces derniers jours». A Aïn Benian, Douéra, Kouba ou à Khraissia, on ne change pas de décor. Des déchets ménagers amassés. Des quartiers plus sales. Les quelques initiatives des associations locales ou de quartiers restent occasionnelles, insuffisantes devant un flux important. A qui incombe la responsabilité ? Officiellement, nous n'avons eu aucune réponse claire de la part des Epic chargées de la collecte des déchets, à savoir l'Exranet et l'entreprise NetCom, en dépit de nos différentes tentatives de prise de contact. Un problème récurrent est soulevé, toutefois par un responsable de service d'hygiène d'une commune d'Alger-Ouest. «Il n'y a plus de personnel qualifié. La main-d'œuvre se fait désormais rare depuis 2013, et ce, à cause du blocage de recrutement du personnel à la Fonction publique.» Il est aussi important de relever le manque de moyen et matériel, comme les camions à benne où équipement spécial pour les distribuer pour les quartiers habituels, mais surtout pour répondre à la demande des nouveaux quartiers et résidences que nos villes enregistrent de jour en jour. Le matériel existant, apprend-on, d'une autre source, «est souvent en panne». Le parc auto de ramassage n'étant pas renouvelé, par manque des finances, plusieurs camions tombent en panne et restent au garage. Une vidéo circule d'ailleurs depuis quelques semaines sur la Toile démontrant la colère et le désarroi des chauffeurs de camion chargés de la collecte. Le chauffeur, qui venait d'avoir un accident de la circulation, met à nu «la politique du laisser-aller des entreprises de collecte». Il montre dans les détails l'état du camion complètement délabré, qui devrait être, dit-il «retiré de la circulation». Et en plus, ce matériel, déjà existant, ne répond forcément pas à la topographie de tout le territoire. Et c'est là où la problématique d'une «gestion managériale» ou «technico-administrative» est posée. Certains évoquent des failles plus profondes comme l'absence des études statistiques précises pour mieux gérer les déchets. Absence de recensement de population depuis 13 ans et surtout ne pas pouvoir étudier dans les détails et les composantes de nos déchets qui nécessitent un traitement outre que celui «copié d'ailleurs». A Constantine, un mal chronique Les Constantinois avaient beau dénoncé ce qui deviendra un mal chronique en milieu urbain, perdurant depuis des mois au centre-ville et même dans les quartiers de la périphérie. Des déchets restent entassés durant des jours sur les trottoirs et même la chaussée, dans l'attente d'un passage des camions du service de collecte qui ne viendront pas. Des images désolantes qui ont circulé sur les réseaux sociaux reflètent l'incompétence des services de la commune de Constantine ayant montré leurs limites dans la gestion de ce volet. Que ce soit dans les rues du quartier de Belouizdad (ex-Saint-Jean), les rues Larbi Ben M'hidi, Didouche Mourad, situées en plein centre-ville, ou même dans les quartiers de Bab El Kantara, Sidi Mabrouk, Filali et autres parmi les plus connus, le constat est le même. «Cela fait des mois que les responsables de la mairie nous font écouter la même chanson en évoquant les problèmes de financement pour le renouvellement des contrats des micro-entreprises de collecte des ordures qui, faute de paiement, refusent de s'acquitter de cette tâche, alors qu'il s'agit d'un problème de gestion et de prévision que ces responsables ne peuvent pas maîtriser», nous révèle un ancien élu à l'APC de Constantine. «Nous en avons marre de cette situation intolérable qui revient de manière cyclique, transformant la ville en une décharge à ciel ouvert avec toutes les nuisances qui peuvent nous être causées», déplorent des habitants de la ville. Ces derniers dénoncent surtout l'attitude des responsables des services de la municipalité qui n'ont même pas réagi pour faire face à cette situation ne ce serait-ce que par un déblaiement provisoire. Ils ne manqueront pas de rappeler qu'à chaque fois ils ont dû faire appel à l'intervention du wali pour mettre un terme à ce qu'ils qualifient de pourrissement et de laisser-aller dans la gestion des affaires de la ville. «Mais jusqu'à quand cela pourrait-il durer ?», s'interrogent-ils. A Oran, un problème récurrent Début février, la commune d'Oran, que ce soit le centre-ville ou les quartiers limitrophes, a croulé sous les ordures. Les concessionnaires privés de la collecte des déchets ménagers, qui n'avaient pas perçu de la commune les créances des deux dernières années, avaient instigué une grève. Depuis le 9 février, la situation tend à s'améliorer, l'Epic propreté Algérie ayant décidé de se charger du ramassage des ordures, épaulée par la division de l'hygiène et de l'assainissement de l'APC d'Oran. Quant aux concessionnaires privés, les responsables concernés assurent qu'ils percevront leurs dus à brève échéance. La collecte des déchets est un problème récurrent dans la ville d'Oran tant les grèves cycliques des concessionnaires privés, ou celle des éboueurs qui touchent des salaires modiques, déteignent presque systématiquement sur le paysage urbain, le rendant hideux et rebutant. Si, depuis le 9 février, le centre-ville a été débarrassé, de façon graduelle, de nombreux points noirs qui l'essaimaient, il va sans dire que le problème de la propreté, dans la wilaya d'Oran, est loin d'être réglé. A chaque fois, sous la pression, des «mesurettes» sont prises, mais qui ne règlent, au final, le problème, que temporairement. Le mois de janvier dernier, l'agence nationale des déchets de la wilaya d'Oran a annoncé, lors d'une réunion au siège de la wilaya, qu'Oran, en tant que commune, recense pas moins de 87 points noirs. Toujours lors de cette rencontre, cette agence avait annoncé, dans une déclaration reprise par l'APS, que la commune d'Oran «paye les salaires pour 3378 agents de collecte alors que le P/APC assure qu'il n'a que 442 sur le terrain». Cela avait d'ailleurs, toujours, selon l'APS, incité le wali d'Oran d'ordonner la mise en place d'une commission «pour définir le nombre réel des agents responsables de la collecte des déchets dans la commune d'Oran» et cela afin «d'assainir le secteur».
Par Nassima Oulebsir, S. Arslane et A. E. K [email protected]