Mobilisés pour une «Journée de la colère», des manifestants libanais ont bloqué plusieurs axes routiers hier pour exprimer leur exaspération face à la dégradation de la situation économique et sociale du pays, rapporte l'agence Reuters. Lundi matin, la plupart des entrées de Beyrouth sont bloquées par des protestataires. Les manifestants ont également bloqué plusieurs routes au sud de Beyrouth, à Tripoli (nord) et dans la vallée de la Bekaa (sud-est). Entre-temps, le président libanais, Michel Aoun, a tenu une réunion «financière, économique et sécuritaire» en présence, entre autres, du Premier ministre par intérim, Hassan Diab. Ce même jour aussi, l'Observatoire de la crise à l'Université américaine de Beyrouth a alerté sur les retombées de cette nouvelle chute monétaire, estimant que «le pire n'était pas encore arrivé». En décembre, la Banque mondiale a évoqué dans un rapport accablant une «dépression délibérée», épinglant l'inaction des dirigeants. Le Liban vit au rythme d'une crise multidimensionnelle. Il est confronté à un effondrement économique des plus dégradants, aggravé par la pandémie de Covid-19 et l'explosion du août au port de Beyrouth. Tragédie imputée à la négligence des autorités et qui a fait plus de 200 morts. Outre des licenciements massifs et une augmentation importante de la pauvreté, la crise s'accompagne d'une dépréciation de la livre qui a perdu plus de 85% de sa valeur, provoquant une inflation à trois chiffres. Ces derniers jours, la livre libanaise a connu une nouvelle chute : le billet vert a frôlé les 11 000 livres sur le marché noir, contre un taux officiel maintenu à 1507 livres pour un dollar, provoquant une nouvelle flambée des prix. Impasse Le pays du Cèdre s'est engagé en 2018 à faire des réformes en contrepartie de promesses de prêts et de dons d'un montant total de 11,6 milliards de dollars. En mai dernier, il a entamé des négociations avec le Fonds monétaire international (FMI) pour obtenir une aide cruciale dans le cadre d'un plan de sauvetage élaboré par le gouvernement. Le Premier ministre Hassan Diab a démissionné dans la foulée de l'explosion au port de Beyrouth, mais son successeur désigné, Saad Hariri, nommé en octobre, n'a toujours pas réussi à former un nouveau gouvernement en raison de désaccords avec le président Michel Aoun. Resté en poste à titre intérimaire, Hassan Diab a menacé samedi de cesser d'exercer ses fonctions pour faire pression sur les responsables politiques afin qu'ils forment un nouveau gouvernement. Conformément aux accords de Taëf d'octobre 1989, qui ont mis fin à la guerre civile au Liban (1975-1990), la structure du gouvernement du pays est tripartite : elle est partagée entre un président de la République chrétien, un président du Conseil sunnite ainsi qu'un président de la Chambre des députés de confession chiite. Le 17 octobre 2019, est déclenché au Liban un mouvement de contestation polaire en raison d'une taxe gouvernementale sur l'utilisation de WhatsApp. Si les autorités ont rapidement supprimé cette mesure, le soulèvement a gagné l'ensemble du pays, pour se transformer en révolte sociale et politique revendiquant le départ de l'ensemble de la classe politique. Advertisements