Les violations des droits de l'homme au Maroc continuent de susciter les inquiétudes des organisations à travers le monde, et plus récemment du département d'Etat des Etats-Unis qui accable le royaume qui persiste dans ses pratiques répressives dans le but de faire taire les voix critiques envers le régime en place. Le département d'Etat s'est dit lundi «déçu» par le verdict de 5 ans de prison prononcé vendredi dernier à l'encontre de Souleiman Raissouni, rédacteur en chef du quotidien Akhbar Al Yaoum (qui a cessé de paraître en mai dernier après 14 ans d'existence). «Nous pensons que le processus judiciaire qui a conduit à son verdict contredit la promesse fondamentale du système marocain de procès équitables pour les personnes accusées de crimes, et il est incompatible avec la promesse de la Constitution de 2011 et le programme de réformes» engagé dans le pays, a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price, exprimant les préoccupations de son département par «l'impact négatif de l'affaire sur la liberté d'expression et la liberté d'association au Maroc». «La liberté de la presse est fondamentale pour des sociétés prospères et sûres, et les gouvernements doivent veiller à ce que les journalistes puissent exercer en toute sécurité leurs rôles essentiels sans crainte de détention injuste, de violence ou de menaces», a-t-il poursuivi. En effet, ce n'est pas la première fois, cette année, que le département d'Etat interpelle les autorités marocaines sur les droits de l'homme. Dans un rapport publié début avril, il avait déjà pointé une situation peu reluisante au Maroc, et dévoilé des cas de torture, disparitions forcées et graves restrictions à la liberté d'expression dans lesquels seraient impliqués des membres des forces de sécurité. Un mois après, soit début mai, le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, invitera les autorités marocaines à réaffirmer leur engagement en faveur de la protection et de la promotion des droits de l'homme. Dans ce contexte, l'Observatoire euro-méditerranéen des droits de l'homme a déclaré, dans un rapport détaillé publié lundi, que les autorités marocaines ont «sévèrement restreint», depuis des années, la liberté d'opinion et d'expression et la liberté de la presse et ont utilisé des méthodes «illégales» pour détenir, poursuivre et diffamer des activistes et des journalistes. Le régime marocain «étouffe» la société Selon l'organisme, les autorités du Maroc détiennent ou poursuivent toujours 21 journalistes et militants des droits civils et humains pour avoir exprimé leurs opinions à travers les médias ou les réseaux sociaux. Durant les deux dernières années et au cours de cette année, des suivis judiciaires contre des journalistes et des activistes ont été prononcés, et certains d'entre eux ont été condamnés à de lourdes peines, d'après le rapport. Selon Euro-Med Monitor, l'absence de garanties constitutionnelles et légales suffisantes pour protéger le droit fondamental à la liberté d'opinion, d'expression et de travail journalistique a conduit à l'exacerbation des violations officielles et des abus envers l'exercice de ces libertés. Le rapport de l'Observatoire euro-méditerranéen, intitulé «Le Maroc… étouffe les autres opinions», s'est basé sur les témoignages de 15 journalistes et militants marocains ou de leurs familles, qui ont fait l'objet de mesures de persécution, de détention ou de diffamation en raison de leurs activités journalistiques et politiques, et de l'expression de leurs opinions sur un certain nombre d'incidents au Maroc. Aussi, le rapport a souligné que les opposants et les journalistes sont visés par des campagnes de diffamation et de déformation sur les médias visuels, les réseaux sociaux et les sites web, afin de les empêcher de critiquer les politiques du royaume. De son côté, Reporters sans frontières (RSF), particulièrement préoccupé par la condamnation arbitraire de Souleiman Raissouni, a signalé que ce dernier n'était pas au tribunal lorsque le juge a annoncé sa condamnation à cinq ans de prison pour «agression sexuelle», des faits qu'il a toujours contestés. La condamnation de Souleimane Raissouni a été prononcée après 4 mois d'une procédure émaillée par de multiples irrégularités. Le parquet avait requis la peine maximale, soit 10 ans de prison ferme, au prétexte notamment que les déclarations du journaliste étaient «contradictoires» tandis que celles du plaignant étaient «concordantes et cohérentes», selon RSF. APS
Détenus sahraouis : Front Line Defenders dénonce la répression marocaine L'organisation internationale Front Line Defenders a prévenu que le prisonnier politique sahraoui Yahya Mohamed El Hafed, défenseur des droits humains, a été transféré par les autorités d'occupation marocaines le 3 juillet de la prison de Bouzairkarn à un lieu encore inconnu, soutenant que «la famille du détenu est extrêmement inquiète pour sa santé et estime qu'il a été transféré dans une autre prison éloignée en guise de représailles». «Le 5 mars 2021, la famille du défenseur des droits humains Yahya Mohamed El Hafed a été autorisée à lui rendre visite à la prison de Bouzairkarn pour la première fois depuis un an. La visite n'a duré que 15 minutes et les gardiens de prison étaient présents tout le temps», explique Front Line Defenders, rappelant que Yahya Mohamed, un défenseur des droits humains sahraoui, est à l'isolement depuis près de 12 semaines et son état de santé s'est rapidement détérioré en raison des conditions inhumaines dans lesquelles il est détenu. De même, Front Line Defenders note que «le 9 décembre 2020, le défenseur des droits humains a appelé sa famille pour la première fois après avoir disparu pendant près de deux mois. Il a informé sa famille qu'il est détenu à la prison de Bouzairkarn, dans le sud du Maroc». «Au 13 octobre 2020, on ne savait pas où se trouvait le défenseur des droits humains Yahya Mohamed El Hafed. Ni sa famille ni son avocat n'ont pu localiser ou contacter le défenseur des droits humains emprisonné et ils sont profondément préoccupés par son état de santé», dénonce l'organisation. Début juillet, la rapporteuse spéciale de l'ONU sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, Mary Lawlor, a déclaré que le régime marocain doit cesser de cibler les défenseurs des droits de l'homme et les journalistes qui défendent les questions de droits humains au Sahara occidental occupé, et leur permettre de travailler sans représailles. «J'exhorte le gouvernement marocain à cesser de cibler les défenseurs des droits de l'homme et les journalistes pour leur travail, et à créer un environnement dans lequel ils peuvent effectuer ce travail sans crainte de représailles», a-t-elle déclaré, selon l'APS qui a rapporté l'information. Lawlor a cité, entre autres, les cas des défenseurs des droits de l'homme Naâma Asfari et Khatri Dadda, qui sont détenus respectivement depuis 2010 et 2019 et purgent des peines de 30 et 20 ans de prison. A. Z.