Le président s'est exprimé sur l'importance du développement cinématographique à deux moments, Juste après son élection et à son retour de convalescence. C'est dire, certainement que cela procède d'une volonté politique inédite. Faut-il y croire ? Les professionnels maintes fois malmenés et pris à défaut par les discours dithyrambiques sur le sujet restent dubitatifs. Ils commencent à s'organiser pour mieux cerner et porter leur vision, mais le carcan dans lequel a évolué le secteur jusqu'à maintenant n'a fait que scléroser les formules. On reste sur les généralités et banalités ne débouchant qu'au replâtrage d'un système qui a engendré une situation des plus catastrophiques. Pas de salles, une production rachitique et à part quelques coproductions une absence totale aux grands festivals internationaux. Oserions-nous encore y croire à cette volonté déclarée ? Pourquoi pas ? Mais soyons réaliste cette fois-çi, nous demandons l'impossible. L'impossible aujourd'hui c'est ce qui était possible il y a de cela presque un demi-siècle. Un décret présidentiel consacrait le droit à la Cinémathèque de ne pas être assujettie à la censure, ni aux taxes fiscales et parafiscales. Depuis, les derniers responsables nommés à la tête de cette institution se sont fait surtout illustrés pour leur passage dans des organismes et commissions de censure. On en est arrivés même à interdire le passage du film Z coproduit par l'Algérie et Oscar du meilleur film étranger. Des salles fermées et un personnel livré à lui-même avec une programmation aléatoire de films piratés sur support DVD pour les 3 ou 4 qui restent fonctionnelles. La situation n'est guère réjouissante du côté des salles publiques appartenant aux institutions (Oref, Onci, wilaya, apc). Doit on continuer dans cette logique ou reformuler le problème autrement, reconnaître que ce système a fonctionné pendant un temps maintenant révolu. Le mode de consommation des images a changé, les techniques de diffusion terriblement évoluées. Les coûts de production des films autant que les budgets ont sensiblement augmenté et les guichets pour leur financement réduits au seul fonds du ministère de la Culture (Fdatic) sans qu'il n'y ait remontée des recettes, faute de salles, mais non de spectateurs. Le public, jeune et moins jeune, quant à lui, existe et attend qu'on lui propose des espaces modernes, corrects et propres pour des projections de qualité comme il en existe partout dans le monde. Pour cela, il faut libérer les initiatives publiques ou privées pour investir dans la construction de complexes et multiplexes cinématographiques. Cependant, vu le carcan juridique et administratif qui régit maintenant le cinéma, il ne risque pas d'y avoir bousculade au portillon. La loi actuelle votée à l'Assemblée nationale n'encourage aucun investisseur à s'y risquer, mais plutôt à les rejeter. Sans préjuger de la nouvelle assemblée, celle-ci ne va nullement ruer dans les brancards et faire mieux que ses prédécesseurs. Reste un projet gouvernemental appuyé par la corporation pour trouver des solutions idoines à même de relancer le secteur et resserrer le tissu en adoptant une législation qui réglemente la profession dans son ensemble. On ne peut continuer à se satisfaire d'institutions dont le rôle s'est réduit à distribuer des plateaux et autres bibelots, ou à se consoler dans une sorte de new ciné club pour se congratuler sans fin et s'agripper en fin de parcours à une structure confinée à un rôle de percepteur sur les aides accordées pour finaliser des projets. La refondation du cinéma algérien est nécessaire et indispensable. Elle ne peut être efficace que si elle est pensée et accompagnée par les professionnels. Une nouvelle structure qui aurait un rôle de régulateur et non une nouvelle concentration des pouvoirs administratifs. Une relance de l'activité cinématographique basée sur le ticket de cinéma et la multiplication des écrans. Une industrie à accompagner par des mesures attractives qui favorise l'investissement aussi bien national qu'international. L'exemple de l'Arabie Saoudite, dernier pays à lever le blocus sur le cinéma, est édifiant. Ce pays termine 2021 avec 600 écrans, de quoi alimenter le fonds d'aide pour la production cinématographique. Si les intentions sont sincères, l'expérience de nos professionnels fera la différence et la relance du cinéma une réalité. Osons le défi, il est à notre portée.
Par Hachemi Zertal Producteur et distributeur de films Advertisements