L'incendie qui a fait 20 morts, dont dix enfants, dans la nuit de jeudi à vendredi dans un hôtel parisien en partie utilisé pour reloger des familles en grande précarité, met à jour une réalité cruelle : un quotidien calamiteux de centaines de familles déboutées du droit d'asile dans l'attente du réexamen de leurs dossiers, des familles attendant un logement social, hébergées dans des hôtels non classés, faute de lieux d'accueil adéquats. Soixante-cinq personnes avaient été placées dans cet hôtel qui a pris feu par le Samu social ou les services de l'Etat, précise la mairie de Paris dans un communiqué. 14 autres y étaient hébergées au titre de l'aide sociale à l'enfance. Devant l'engorgement des dispositifs du logement d'urgence et du logement social, les pouvoirs publics recourent aux services d'hôtels. Selon un rapport de juin 2004, réalisé par la préfecture de police de Paris, plus de 8000 personnes étrangères, adultes ou enfants, sont hébergées à l'hôtel, à Paris ou en proche banlieue. Il s'agit de demandeurs ou de déboutés du droit d'asile, logés dans quatre à cinq cents hôtels de Paris ou de sa banlieue. Leur hébergement est pris en charge par les pouvoirs publics. Les demandeurs ou déboutés du droit d'asile n'ont pas le droit de travailler. Le taux d'admission à l'asile est faible, il était de 14,8 % pour 90 000 demandes en 2003, mineurs y compris. La ville de Paris, pour sa part, finance l'hébergement de 2500 personnes au titre de l'Aide sociale à l'enfance (ASE). Il s'agit en général de familles de nationalité française ou étrangère en situation régulière, mais qui ne parviennent pas à accéder au logement ordinaire. Nombre d'entre elles sont inscrites depuis des années au fichier des demandeurs de HLM. L'offre d'hébergement social est insuffisante. L'attente pour un logement social requiert souvent plusieurs années. Quant aux familles déboutées du droit d'asile, elles ne peuvent y prétendre, n'ayant aucun droit. Le parc national comptabilise 4 millions de logements sociaux dont 1,2 million en Ile-de-France. En 2003, 320 000 personnes étaient en attente de logements sociaux, selon l'Union sociale pour l'habitat : « Il faut cesser d'héberger des familles dans des hôtels de tourisme, un pis-aller coûteux pour les collectivités publiques, inadapté, précaire et dangereux pour les familles sans logis (...) Le chef de l'Etat (doit) donner ordre au gouvernement de faire appliquer la loi de réquisition », réclame l'association Droit au logement. « Les pouvoirs publics n'ont pas mis en place les moyens de loger convenablement » les populations les plus fragiles, de surcroît « victimes de la spéculation immobilière et de la crise du logement », a déploré le président de Droit au logement Jean-Baptiste Eyraud. Pour sa part, le MRAP préconise « une vraie politique qui consacre le droit au logement pour tous ».