Construit en 1985, l'hôpital Mohamed Yacob, qui couvre les daïras de Beni Abbès, Igli, El Ouata, Kerzag et Oulel Khodeir avec une population de plus de 42 000 habitants, ne dispose d'aucun médecin spécialiste. Pourtant, plus de 10 services ont été prévus dans cet établissement : gynécologie, chirurgie, ophtalmologie, médecine interne, pédiatrie, ORL, chirurgie dentaire, radiologie, réanimation, laboratoire et pharmacie. En dépit des efforts immenses déployés par les médecins généralistes, la population locale reste pénalisée, notamment, lors de l'apparition de pathologies méchantes ou compliquées. Une femme d'Ouled Khodeir doit, pour consulter un gynécologue à Béchar, parcourir plus de 400 km. D'autres malades sont évacués vers Oran ou Alger. C'est la même contrainte pour l'acquisition de médicaments. Dans le chef-lieu de Beni Abbès, il n'y a que 3 pharmacies : l'une relève de l'Endimed, l'autre privée et annexée à l'hôpital et la dernière assure les malades hospitalisés. Abdelmalek Demane, médecin urgentiste et sous-directeur de l'hôpital, explique que le problème sérieux auquel est confronté l'hôpital en matière de prise en charge spécialisée réside dans les spécialités de base dont la chirurgie générale, la gynécologie, la pédiatrie et l'ophtalmologie. Pour sa part, le directeur de l'hôpital Ben Abdelmalek indique que tous les spécialistes désirant s'installer à Beni Abbès sont les bienvenus, car « toutes les conditions sont réunies, comme des logements bien équipés ». Mais le responsable de cet hôpital appelle les autorités à hisser le secteur sanitaire de Beni Abbès de la catégorie C à la catégorie B ou A et à encourager les médecins du moyen et du grand sud par des mesures incitatives « importantes ». Préférant parler de convention,M. Ben Abdelmalek reconnaît que la méthode de jumelage a montré ses limites. « Il y a 36 spécialistes dans le secteur sanitaire de Béchar et avec lequel on pourrait faire des jumelages. Dans la pratique, c'est irréalisable. D'abord le secteur sanitaire de Béchar est incapable de couvrir sa population. Ensuite, le responsable du secteur sanitaire de Béchar n'est pas en mesure de prendre en charge les frais de déplacement et de rémunération de ses spécialistes. Le législateur a omis de stipuler le contraire. C'est-à-dire, la prise en charge incombe à l'établissement accueillant », illustre Ben Abdelmalek. En attendant de remodeler les textes pour inciter les spécialistes à s'installer dans le sud, le directeur de l'hôpital se dit prêt à garantir « une prise en charge totale avec une rémunération consistante ». Rappelant que des missions médicales indiennes et russes ont duré jusqu'à 4 ans, Ben Abdelmalek se demande le pourquoi de la non-réalisation de ce type de missions par des Algériens, sachant qu'un spécialiste algérien coûte la moitié du salaire réservé à un étranger. L'optimisme du directeur Notre interlocuteur n'a pas omis d'exprimer son optimisme de voir des spécialistes s'installer définitivement à Beni Abbès. « Nous avons une belle structure hospitalière, des logements équipés, des équipements médicaux de base, des moyens de transport dont 2 ambulances de l'hôpital », dira-t-il pour attirer les spécialistes du Nord. « Le problème logistique et matériel ne se pose pas », réitère-t-il. Aussi, Ben Abdelmalek suggère, dans un cadre réglementaire, la signature de conventions avec, entre autres, le CHU de Bab El Oued (Alger) et celui d'Oran. En guise de proposition, le directeur de l'hôpital, qui fait remarquer que l'indemnité salariale est de 180% au Grand Sud et de 120% dans le Moyen Sud, souhaite que le gouvernement uniformise cette indemnité. Son subordonné, Abdelmalek Demane, revient sur la politique du ministère qui consiste à centraliser les services spécialisés dans les chefs-lieux de wilaya et de procéder au transfert des malades à partir des daïras. A ce sujet, le médecin urgentiste tient à attirer l'attention des autorités sur le problème épineux du transfert, avec un manque sensible des ambulances. Le sous-directeur de l'hôpital Mohamed Yacob recommande de revoir les salaires si on veut faire venir des spécialistes. « La tutelle doit revoir le terrain et changer de politique », affirme-t-il, avant d'estimer qu'un salaire de 300 000 DA reste insuffisant. « Durant le mois d'août, il fait 60 degrés à Beni Abbès », illustre-t-il. Le même responsable se demande pourquoi on paie un spécialiste à Ben Cherk à 180% et à Ksobi à 50% alors que les deux médecins vivent dans les mêmes conditions et à la même température. Docteur Demane conclut qu'il y a beaucoup de moyens pour encourager aussi bien les spécialistes que les généralistes. Sur le même chapitre, il convient de souligner la proposition récente du syndicat national des spécialistes de la santé publique (SNSSP) qui a suggéré à la tutelle d'opter pour des missions ponctuelles de 6 mois avec des avantages afférents à la région du Sud. L'initiative du SNSSP a été tuée dans l'œuf à cause d'un malentendu avec le ministère sur sa mise en application.