Du 4 au 12 mai, le grand hall rénové du palais de la culture et des arts Mohamed Boudiaf de Annaba accueille le 1er Printemps du livre et de l'auteur. Douze éditeurs nationaux y ont dressé leur chapiteau aux côtés de l'université Badji Mokhtar et de l'antre de l'écrivain et historien H'sen Derdour, décédé il y a quelques années. La manifestation, inaugurée officiellement mercredi après-midi, a été une occasion pour les visiteurs de relancer le débat sur le prix du livre. Depuis, tout se passe comme si les 20 000 livres exposés sur les étalages appellent à une révolution. Celle-ci est destinée à amener l'Etat à subventionner le livre. Pour l'heure, l'on se limite à débattre et à poser des mains respectueuses sur des livres d'éditions nationale et étrangère. Les visiteurs en compulsent quelques-uns, lancent un regard affolé sur le prix affiché, traînent quelques minutes puis s'en vont comme ils étaient venus. C'est-à-dire, pour la majorité d'entre eux, sans rien avoir acheté. Ce Printemps du livre et de l'auteur de Annaba organisé par la direction de wilaya et de la culture est un composé de plusieurs éditeurs et auteurs connus ou méconnus. L'on a rassemblé en quelque sorte des livres et œuvres littéraires de tous les courants fugaces, antagonistes et obsédants. Le décor du hall du palais de la culture et des arts Mohamed Boudiaf est tout simplement à la mesure de l'événement. Pour une fois, ce lieu qui a vu mourir assassiné Mohamed Boudiaf à l'époque président du Haut Conseil de l'Etat, a été digne de son appellatif. Les organisateurs ont planifié de faire palpiter le cœur et la passion de la lecture de ceux qui, en Algérie, l'ont abandonnée parce que trop coûteuse. Dans ce tournis à la couleur bleue sur un dallage blanc transi, l'on a respiré un vent de lyrisme. Il y avait tout un ressac de livres et de noms d'auteurs de culture arabe et latine lesquels, compulsés, appellent à être lus. A travers cette initiative, Driss Boudiba, directeur de la culture locale, lui-même écrivain et poète, invite tout le monde, autorités locales, éditeurs, auteurs, lecteurs et visiteurs à faire un état des lieux du livre dans notre pays, à établir aussi l'état d'âme de l'édition algérienne qui consent aux morsures du temps. Dans les propos échangés entre visiteurs, éditeurs et auteurs, l'on est arrivé à soulever la question du nécessaire débat sur l'édition algérienne. Les uns et les autres ont dénoncé ce qu'ils ont qualifié d'épidémie rampante de l'inculture dans notre pays. Spontanés et passionnés, leurs propos soulignaient l'incontinence, la surdité et la solitude de l'édition algérienne. Sa pauvreté aussi et la compassion qui ne relèverait pas de la gérontologie que l'on éprouve au contact de l'édition algérienne toujours aussi jeune malgré le nombre d'années. La manifestation culturelle de Annaba qui porte en elle les fleurs du mois de mai a permis d'établir un constat sur l'édition en Algérie. L'on est ainsi arrivé à dire que malgré les nombreux obstacles, elle s'efforce lentement mais sûrement de combler ses lacunes. Sachant que le livre n'est pas actuellement le plus absurde des cadeaux, des éditeurs pourraient lancer dans les prochains mois une grande opération de vulgarisation sur le « comment offrir un livre en cadeau ». Les érudits ne manqueraient certainement pas d'apprécier cette démarche, si elle venait à être appliquée, comme ils ont eu à apprécier ce jeudi les interventions des juristes Baâli Med Seghir et Zerdazi Abdelaziz sur la propriété intellectuelle et les droits d'auteur. Aujourd'hui, samedi 7 mai, J.P. Demas est prévu pour aborder dans le cadre d'une conférenc-débat, « L'industrie de l'art graphique ». Le Printemps du livre et de l'auteur à Annaba sera ponctué le 12 mai par un grand rendez-vous entre deux hommes de religion que sont le Dr Cheikh Bouamrane, président du Conseil supérieur islamique, et Mgr Henry Tessier, archevêque d'Alger.