Les massacres du 8 Mai 1945 dans la mémoire nationale » est le thème du colloque international qu'organise, les 7 et 8 mai 2005, l'université Ferhat Abbas, en commémoration du 60e anniversaire du génocide d'un peuple sauvagement réprimé pour avoir réclamé son droit à la liberté. Un panel d'universitaires et d'historiens : Français, Tunisiens, Marocains et Algériens, est attendu du côté de l'antique Sitifis où auront lieu les festivités officielles. La problématique tournera autour de « La lecture historique des événements du 8 Mai 1945 », « L'impact des massacres sur l'opinion internationale », « Les massacres du 8 Mai 1945 dans la presse française et internationale » et « Les réactions du mouvement nationaliste algérien après les événements du 8 Mai 1945 », « Le rôle et la relation de ces événements dans le déclenchement de la révolution de Novembre » et « La nature de l'activité politique et l'émergence d'une conscience révolutionnaire » sont les principaux axes des 27 conférences prévues. L'intervention de René Gallissot portera sur l'inconscience patriotique française du débarquement allié de novembre 1942 au 8 mai 1945. Nicole Dreyfus mettra, quant à elle, le doigt sur la double conséquence du massacre du 8 Mai 1945. L'accentuation de la répression colonialiste et le renforcement de la lutte du peuple algérien pour l'indépendance sont l'autre point de la communication précitée. Henri Pouillot revient, quant à lui, sur la politique de négation ayant engendré la prise de conscience d'un peuple avide de recouvrer une qualité de citoyen à part égale. Le conférencier considère que le massacre des dizaines de milliers d'Algériens, n'ayant en rien réglé leurs aspirations, aura l'effet d'une bombe à retardement qui explosera neuf ans plus tard. L'impunité des crimes contre l'humanité, cet important sujet resté sans réponse des décennies durant prendra une part prépondérante dans les interventions des uns et des autres. Il sera vraisemblablement le point récurrent des débats. Abdelhamid Salakdji, le présentant local de la Fondation du 8 Mai 1945, profitera de l'occasion pour remettre, dit-il, sur le tapis les questions de la repentance et de l'indemnisation : « Les victimes de ce carnage luttent contre la culture de l'oubli et du pardon surtout lorsqu'il s'agit d'une tuerie ayant fait plus de 45 000 morts. Ce génocide froidement programmé et ratifié au plus haut niveau ne peut demeurer éternellement impuni. La France doit emboîter le pas à l'Allemagne et au Japon ayant, pour les abominables crimes perpétrés lors de la Seconde Guerre mondiale, demandé pardon. La question de l'indemnisation ne doit pas être occultée ou considérée comme sujet tabou. » Le professeur Smaïl Debbèche, recteur de l'université de Sétif, a une vision académique du problème : « Le devoir de mémoire interpelle Algériens et Français à ouvrir, sans passion aucune, le dossier des horribles massacres du 8 Mai 1945, faisant désormais partie de la mémoire commune des deux peuples. Ce colloque est une autre opportunité qui permettra aux historiens de situer les responsabilités des gouvernements français de l'époque. En reconnaissant la réalité de la répression, des assassinats et des massacres, la France, par le biais de Son Excellence l'ambassadeur Hubert Collin de Verdière, et ce, lors de sa dernière visite à Sétif, sort de sa réserve et assume sans ambages son entière responsabilité. Ce premier pas ouvre la voie à une nouvelle ère. Le traité d'amitié que les deux chefs d'Etat parapheront prochainement sera le jalon de la nouvelle mémoire commune des deux rives de la Méditerranée. » Les rescapés du génocide qui n'ont, 60 ans après, rien oublié de ce mardi noir demandent en outre un droit de regard sur les archives.