Le commerce informel du téléphone portable prend des proportions alarmantes. En l'absence de statistiques crédibles, les spécialistes avancent toutefois un chiffre : 300 000 appareils importés frauduleusement en 2004 ont atterri chez les consommateurs, soit le quart des 1,2 million d'unités légalement entrées au pays. Dès lors, on parle déjà de plaque tournante dont les plus importantes demeurent Oran (M'dina Jdida), Alger (El Harrach) et Sétif (marché Dubaï). Approvisionnées par la filière des frontières, ces places proposent au grand jour toutes les marques à un prix nettement plus bas que celui du magasin. La saisie, le 5 mai 2005, de près de 600 appareils, opérée dans le train Oran-Alger par les gendarmes, renseigne sur l'ampleur du phénomène. « Ce n'est rien par rapport aux quantités qui échappent à notre vigilance », reconnaît l'officier. Selon une source au fait du trafic, la marchandise écoulée à Oran provient d'Espagne en transitant par le Maroc. Le marché frontalier de Zouia sert aussi de « halte » au réseau. Cependant, les jeunes trabendistes algérois préfèrent faire l'économie du trajet (et aussi le risque d'être appréhendés). « Je me déplace 3 fois par mois en me limitant strictement à la navette Alger-Oran. La marchandise m'est remise à l'hôtel où j'ai l'habitude de descendre », nous confie un jeune de 22 ans, originaire de Bab El Oued. Face à ce trafic, les importateurs interpellent. « Nous subissons une concurrence déloyale dans la mesure où le trafiquant ne paie pas un rond, ni à la douane ni au fisc », s'élève un opérateur activant à Alger. L'importation frauduleuse du portable est décriée aussi par la Société industrielle des télécommunications (SITEL), l'unique société qui fabrique ce type d'appareil en Algérie. Réunissant les entreprises publiques comme Sonatite, ENTC, la BNA, SITEL est associée au suédois Ericsson qui détient 35% du capital. Deux modèles de portables sont fabriqués dans les usines de SITEL à Tlemcen : le GM 824 et le GM 882. « Nos produits répondent aux normes les plus pointus. La qualité n'a rien à envier à celle proposée en Europe. Malheureusement, nous sommes contraints de diminuer notre production en raison d'un marché déstructuré », nous a déclaré le directeur général de SITEL, M. Baghli. Et de préciser que si les portables SITEL sont boudés par le consommateur (environ 8000 DA sur le marché du détail) « c'est à cause de ces gadgets à 4000 DA ». En effet, la durée de vie de nombre de marques n'est limitée qu'à quelques mois.