Rappelés pour un contrat à durée déterminée pour faire face à un plan de charge aujourd'hui épuisé, 87 travailleurs de l'entreprise manufacturière de chaussures Mac-Soum à Akbou (Béjaïa) refusent de prendre leur décision de fin de contrat. Ils sont encore dans les ateliers et ne semblent pas disposés à les quitter définitivement pour retrouver le monde du chômage. J'y suis, j'y reste ", semble être le mot d'ordre de chacun d'eux. Partis de l'entreprise, dans le cadre de la compression des effectifs (départs volontaires) mise en application en 1997, ils ont été rappelés en été 2004 pour un contrat à durée déterminée de 3 mois, renouvelé par la suite, pour répondre aux besoins urgents d'une commande totale de 300 000 paires de chaussures provenant de la part du ministère de l'Emploi et de la Solidarité nationale. La commande a été satisfaite dans les délais, en septembre 2004, signifiant l'épuisement du plan de charge de l'entreprise qui devra livrer ce 31 mai une dernière tranche de 30 000 paires de chaussures, sur une commande totale de 100 000 paires, pour la garde communale. Pour les 87 contractuels, l'entreprise a du travail en perspective : une commande d'au moins un million de paires de chaussures. Cet espoir, ils le tiennent d'une promesse du ministre de l'Emploi et de la Solidarité nationale que l'on a pris au mot lorsque, au cours de sa visite en février 2004 à l'entreprise pour la signature d'une commande ferme de chaussures pour enfants et diabétiques destinées à une opération de solidarité au profit des démunis, il a promis de solliciter encore une fois Mac-Soum pour une nouvelle production d'un million de paires de chaussures. Mais depuis, on n'a plus entendu parler de ce million de paires de chaussures et encore moins revu M. Djamal Ould Abbas ou ses représentants dans la zone industrielle d'Akbou. Le ministre a promis et a laissé suspendu à sa promesse le devenir d'une entreprise dont ses contractuels se sont engagés dans un véritable bras de fer avec le PDG. Ne lâchant pas prise, ils sont allés jusqu'à solliciter l'intervention du président de la République à travers une lettre ouverte publiée dans la presse. " S'appuyant sur les grands axes de votre programme présidentiel, Monsieur le Ministre de la Solidarité nous a permis de reprendre nos postes de travail (...), il nous a promis un plan de travail pour un million de paires de chaussures pour les nécessiteux et les démunis. Aujourd'hui, nous attendons toujours la concrétisation de ce plan ", écrivent-ils en soulignant qu'ils croient " à la parole donnée par les officiels ". Bras de fer La direction a déposé une plainte au niveau du tribunal d'Akbou contre une quarantaine d'entre eux, qui refusaient de partir au début de la semaine dernière, avant de saisir une deuxième fois le procureur général près la cour de Béjaïa. Dans la foulée, trois travailleurs permanents, accusés d'être les " meneurs " de ce mouvement de protestation intra-muros, ont été licenciés et ont fait objet eux aussi d'une plainte déposée auprès de la juridiction d'Akbou. "On ne peut pas mettre en péril 550 travailleurs permanents à cause de 87 contractuels ", c'est en substance l'argument qui a présidé à la décision de non- renouvellement des contrats. " Un acte de gestion " explique-t-on. " Qu'on mette ces contractuels en congé, même sans solde, mais que cela soit pour une période limitée ", nous dit l'un des trois licenciés qui semble prendre sur lui la défense des 87 contractuels et en évoquant, dans la foulée, les dispositions de la convention de branche signée entre la Fédération nationale des textiles et cuirs (UGTA) et la société des participations Industries manufacturières. Des dispositions (article 21) qui donneraient la priorité aux travailleurs compressés dans les opérations d'embauche. " Pourtant, ce sont des travailleurs enregistrés au chapitre des départs volontaires, donc qui pouvaient ne pas bénéficier de ces contrats ", nous explique une source, dont nous respectons le désir d'anonymat. Les protestataires ne partiront, nous dit un de leurs représentants, qu'avec des titres de congé qui prendront le temps que le nouveau plan de travail arrive. C'est que, pour eux, il y a de l'engagement dans les propos de M. Ould Abbas. Pour les responsables de Mac-Soum, les concernés, autant les 87 contractuels que les 3 licenciés, ont enfreint la réglementation et il sera difficile de les voir réintégrer leur poste de travail quand bien même l'entreprise viendrait à émettre un besoin exceptionnel d'une main-d'œuvre temporaire. Jusqu'au week-end dernier, les uns guettaient l'intervention des forces de l'ordre, l'autre le bon de commande du ministre.