Les voies de l'investissement privé dans la wilaya de Mila, sont-elles si impénétrables, complexes et semée d'embûches, comme le laissent insinuer le marasme et la déprime économiques ambiants, alors que, de surcroît, les potentialités industrielles dans cette région sont homéopathiques pour ne pas dire inexistantes ? Donc, si la machine économique, après la traversée du désert qui aura duré une dizaine d'années, n'arrive pas à décoller et continue à se confondre en grincements et en soubresauts, ce n'est pas faute d'avoir essayé. Selon l'avis d'observateurs avertis, les raisons de cette morbide récession seraient plutôt dues au syndrome incontrôlé de détournements tous azimuts de projets d'investissement de leur vocation initiale. Eriger exagérément des hammams, de petits centres commerciaux et des habitations cossues un peu partout en place et lieu d'assiettes affectées pour l'investissement, s'est avéré un obstacle de taille qui a fini par compromettre toute dynamique d'investissement sérieux. Lecture qui est loin d'être une simple vue de l'esprit tant elle est régulièrement relayée et décortiquée quoique dans l'informel par la vox populi. A fortiori, les intrusions et les incohérences des barons du détournement des poches foncières sont légion, palpables et décelables à merci. D'ici à ce que d'aucuns crient à la rapine, il n'y a qu'un pas que l'APW n'a pas hésité à franchir en inscrivant à l'ordre du jour de sa 4e session l'épineuse question de l'investissement privé et la nécessité d'en expurger les exactions commises. Or, et aussi curieux que cela puisse paraître, la commission de wilaya du Calpi, loin de chômer, a, durant la décennie 1994-2004, agréé 930 dossiers et rejeté 518 sur un total de 1448 dossiers d'investissement étudiés. En clair, le volume au demeurant assez important des dossiers validés aurait dû se traduire, selon certains observateurs, par l'amorce d'une perspective économique articulée autour de la création de richesses et d'emplois, si les projets qu'elle sous-tend n'ont pas été dévoyés et exploités à des fins aussi indélicates qu'inavouées. Angle d'attaque que choisira justement la commission économique et financière de l'APW qui soulignera dans son rapport que des lots de terrain attribués dans le tissu urbain et destinés à l'investissement ont été soit vendus, soit transformés en villas fastueuses avec des commerces ayant pignon sur rue. Ladite commission demandera en plus l'assainissement du fichier des projets d'investissements et exigera la récupération des terrains attribués aux faux investisseurs et leur réaffectation pour la réalisation d'équipements publics. A cet effet, les autorités locales déclencheront une large opération contre les indus investisseurs et les spéculateurs de tout acabit dès l'année 2000. Une opération coup-de-poing qui se soldera par l'annulation de 498 agréments dont 382 situés dans les zones d'activités et 116 dans le tissu urbain. Cela dénote que la boulimie démesurée des « vrais-faux » investisseurs privés, remis à flot par les pesanteurs, les accommodements et les ramifications d'une administration jusque-là complaisante pour ne pas dire complice a réduit à la portion congrue la mise en œuvre efficace de ce dossier. Dès lors, ce sera un cautère sur une jambe de bois que de persister à considérer cette lancinante équation avec un trop-plein d'a priori. Quoique se comptant sur les doigts d'une seule main, quelques investisseurs engagés et intègres ont réussi, en dépit des tracasseries administratives, la gageure de s'imposer comme modèle de succès dans leurs créneaux de production respectifs. Le pari amplement gagné par la conserverie industrielle Oucherif sise à douar Meghelssa, Chelghoum Laïd, ou encore la laiterie Eurl Grouz Benhacine de Oued Athmania, en sont la parfaite illustration. Le nouveau wali de Mila, en homme de terrain, rompu à la grande manœuvre et aux dossiers brûlants, est à présent mieux avancé que quiconque sur la teneur de l'hémorragie qui a affecté le foncier urbain. Saura-t-il relever le défi et démêler l'échevau ? Les larges prérogatives dont il jouit, ses compétences avérées et son abnégation plaident plutôt en sa faveur.