Sur les sept anciens détenus français de Guantanamo, six sont toujours en prison en France pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ». Ils ont été incarcérés dès leur retour en France, le 27 juillet 2004 pour quatre d'entre eux et le 7 mars dernier pour les trois autres. Un seul, d'origine indienne, n'a pas été poursuivi et vit depuis son retour en Grande-Bretagne. Au cours d'une conférence de presse au siège de la Ligue des droits de l'homme (LDH), les avocats des anciens détenus de Guantanamo ont critiqué sévèrement la justice française et ont fait part de leur intention de saisir la Cour européenne des droits de l'homme. « Le maintien en détention des ex-détenus de Guantanamo en France est , sur le plan strictement humain, une ignominie », a déclaré William Bourdon, avocat de Nizar Sassi et Mourad Benchellali. Les avocats ont signalé la dégradation des rapports entre les prévenus et les juges d'instruction chargés du terrorisme. Selon William Bourdon, ces rapports se limiteraient à des interrogatoires. « L'attitude des juges atteint des sommets d'inhumanité et de cruauté mentale », s'indigne le célèbre avocat. Il a précisé que les prévenus avaient été interrogés plus de deux cents fois dans le centre de détention américain de Guantanamo, à Cuba. Imbroglio juridique Les avocats mettent en avant l'état de santé de leurs clients pour demander une requête en nullité. Les expertises médico-psychiatriques réclamées en août 2004 par les avocats ont été effectuées en février 2005. « Cela montre une volonté de l'institution judiciaire de dissimuler l'état de santé de ces hommes. Une requête en nullité, déposée en février, n'a toujours pas été audiencée aujourd'hui. Rien ne peut le justifier », note Michel Tubiana, président de la LDH. William Bourdon a fait état d'expertises psychiatriques réalisées en février dernier sur deux de ses clients, Nizar Sassi et Mourad Benchellali. Le docteur Michel Dubec a conclu que Nizar Sassi « ne se remettra jamais psychiquement de cette détention (celle de Guantanamo) ». Concernant Benchellali, l'expert note qu'il ne porte pas de trace de sévices corporels, « en revanche les mauvais traitements, les conditions de vie particulièrement précaires, l'isolement forcé, l'incertitude des lendemains entretenue jour après jour, le danger potentiel réactivé par les interrogatoires poussés laisseront des traces traumatiques durables chez l'intéressé ». Après décision de la cour de cassation, la cour d'appel de Paris doit examiner mercredi la plainte déposée contre X pour « atteinte aux libertés, séquestration et détention arbitraire » par les familles de deux détenus à Guantanamo. La chambre d'instruction de la cour d'appel de Paris peut suivre l'avis de ses collègues lyonnais qui ont refusé d'instruire la plainte ou de désigner un juge pour qu'il instruise la plainte. Tous les détenus européens incarcérés à Guantanamo avaient été remis en liberté une fois revenus dans leur pays d'origine.