Ortal, c'est son nom, a 26 ans et elle a composé elle-même Chacun pense à soi, une chanson aux accents berbéro-andalous. Le même jour, l'Institut du monde arabe (IMA) clôt son festival « Les beurs font leur chanson », après quatre mois de programmation qui a donné à voir la formidable percée opérée dans la chanson française par toute une génération franco-maghrébine, à forte dominance algérienne et féminine. En effet, après Laâm et Assia, ont successivement émergé Nâdiya et Chimène Badi aux centaines de milliers de singles et d'albums vendus au chapitre de la variété, tout comme Amel Bent et Wallen, 27 ans, native de Seine-Saint-Denis qui, elles, ont percé dans le R'n'b (le Rythm and Blues). Le temps est loin où un Karim Kacel - programmé en janvier à l'IMA - faisait figure d'exception dans un paysage musical français alors très gaulois en ce début des années 1980... Depuis, la vague kabyle et le raï (Khaled, Mami, Bilal), ainsi qu'un certain Rachid Taha sont venus métisser une chanson française revisitée quelque temps après par le groupe Zebda et Magyd Cherfi (lequel a entrepris récemment une carrière en solo), tandis que Souad Massi a su imposer progressivement son folk acoustique et ses « protest-songs ». Aujourd'hui, qu'il s'agisse de la chanson à texte (Ridan et Gavroche), de la scène fusionnelle franco-maghrébine (Oriental House) de l'afro-funk oriental (Rythm'n'Bled), du rap (Rim'K du 113), de l'électro-arabesques (Digital Bled et Kahina), de l'oriental pop (Samira), de la soul-blues (Anis), du berbère aux accents afro-jazz (Iness Mezel), on assiste à une véritable explosion de la scène musicale « beur ». Il suffit de regarder à la télévison « Graines de star », « La Nouvelle Star » ou « Star Academy » pour constater l'engouement de toute une génération pour l'expression musicale. D'où l'excellente initiative de l'IMA qui a choisi de donner un large aperçu sur ceux qui ne sont pas toujours sous les feux de la médiatisation, mais qui remplissent les salles telles que le Cabaret Sauvage, Le Divan du Monde, le Bataclan ou la Cigale ; tandis que l'Olympia - qui a déjà accueilli Souad Massi - recevra à la rentrée la jeune Nâdiya (qu'on a vu en duo avec Khaled sur TF1 dans l'émission « Podium » le 14 mai). L'IMA poursuivra sa programmation musicale en juin avec son 6e Festival de musique du 15 au 18, et sa Fête de la musique sur le parvis le 21. Ce sera l'occasion de revoir Idir sur scène (le 15 juin), un Idir dont la longévité artistique étonne lorsqu'on sait que Vava Inouva remonte à l'été 1973 ! Sont également au programme de ce festival, l'Irakien de Paris Fawzy El Aledy, la Comorienne Narval (tous les deux le 16 juin), la Palestinienne Kamilya Jubran et le trompettiste Werner Hasler ainsi que ses compatriotes Naziha et Adel Salameh (le 17 juin), l'Algérien Bilal et son « raï d'auteur » (le 18 juin) tandis que Mugar (berbéro-celtique), cheb Tarik (raï), Zahra (populaire marocain) et cheb Imed (folk sud tunisien) animeront la fête de la musique le 21 juin sur le parvis de l'IMA.