La gare routière de Chéraga, grouillante le jour, désemplit très rapidement dès le crépuscule. Quelques hardis transporteurs continuent, toutefois, à assurer la liaison vers El Qaria, un quartier périphérique qui ne cesse de grossir. Ouled Fayet, l'autre destination prometteuse - au vu de son enclavement et de la croissance exponentielle de sa population - est boudée on ne sait pourquoi. Hiver comme été, les chauffeurs de microbus désertent tôt les lieux, laissant les nombreux retardataires à la merci des taxis clandestins. Et de fait, dès les derniers départs, les arrêts sont squattés par de nombreux automobilistes qui jouent aux chauffeurs de taxi. « Le métier », ils le pratiquent au vu et au su de tout le monde, y compris des services de police. Le prix des courses dépend souvent de la météo, parfois c'est à la tête du client : s'il fait mauvais, s'il pleut ou s'il y a risque d'orage, on peut vous exiger jusqu'à 500 DA pour les 4 km qui séparent Chéraga d'Ouled Fayet. S'il fait beau, le tarif baissera un peu, entre 200 et 250 DA, ce qui, avouons-le, est hors de portée des usagers, de simples travailleurs pour la plupart, si ce n'est des collégiens. Enfin, si vous êtes en famille, préparez-vous au dépeçage en règle. Alors, pour les téméraires, il n'y a plus qu'à user ses souliers sur des trottoirs à peine visibles, dans la pénombre qu'accentue le feuillage de gigantesques eucalyptus, en priant la providence de ne pas faire de mauvaises rencontres en chemin.