Persécuté par la sécurité du pouvoir, Khaïri Dhahabi, le plus innovateur des romanciers syriens contemporains, vit aujourd'hui dans une situation peu enviable. Damassien, n'appartenant pas à la caste « alaouite » au pouvoir, il ne peut bénéficier d'aucune faveur et d'aucune pitié. Renvoyé à la retraite avec un salaire misérable de 2000 lires syriennes (environ 3000 DA), il vit dans les limites du dénuement. De plus, il lui est interdit de publier ses livres dans son pays. Malgré cette persécution constante et cette misère imposée par le pouvoir baâthiste, Khaïri Dhahabi continue d'écrire. Heureusement qu'à côté il y a Beyrouth, ville de liberté et de culture depuis les célèbres Phéniciens. Khaïri Dhahabi publie donc au Liban pour être diffusé dans le monde arabe. Tant pis si son pays ne veut pas de ses romans ! Depuis quelques années, Khaïri Dhahabi est revenu à l'histoire. Il pense que seule l'histoire peut expliquer « le phénomène des dictatures » dans le Moyen-Orient. Sa conclusion est terrible : la majorité des juntes qui commandent le Moyen-Orient puisent leurs idéologies et mœurs des « Mamlouk » (tribus tartares et turques du XIVe siècle) qui ont plongé le Moyen-Orient dans la misère et le sous-développement pendant des siècles. Dans sa trilogie les métamorphoses (1er tome : Hassiba, 2e tome : Hicham, 3e tome : Fayadh), il dissèque l'histoire des « Mamlouk », ces gouvernements mongols et turcs qui ont tyrannisé les peuples du Moyen-Orient, en général, et ceux du Cham (dont faisait partie la Syrie actuelle) en particulier, près de quatre siècles. Il y a 4 ans, Khaïri Dhahabi a écrit dans l'un de ses romans qu'une fille chrétienne « portait un collier en or avec une croix qui lui tombait entre les seins ». Il fut convoqué par le puissant Ali Akla Arsane, président de l'Union des écrivains arabes (association des écrivains syriens), chef de la censure et de l'imprimature en Syrie. Khaïri Dhahabi fut tabassé dans les bureaux de la « vénérable » Union des écrivains arabes ! Accusé de subversions (tachouiche), de « fauteur de troubles » parmi les chrétiens (en Syrie, les chrétiens représentent 10% de la population), Khaïri Dhahabi est depuis ce jour surveillé de près par la « tchaïka »(1) du parti baâth. Les sbires du pouvoir syrien surveillent même ses déplacements à l'étranger ou ses participations aux colloques littéraires internationaux. Un sbire est toujours là pour rédiger un rapport accablant notre écrivain. Ainsi, au lieu de libérer ses terres occupées par Israël depuis 1967, le pouvoir dictatorial syrien passe son temps à surveiller et persécuter des écrivains nationalistes et innovateurs comme Khaïri Dhahabi. (1) Tchaïka : milice en russe.