La libération de prisonniers palestiniens par les autorités israéliennes donne toujours lieu a des scènes émouvantes où se mêlent les sentiments de joie et de tristesse. La joie de ceux qui ont pu de nouveau respirer l'air de la liberté, ainsi que de leurs proches ; mais aussi la tristesse chez ces mêmes personnes ainsi que chez les familles des autres prisonniers qui sont restés derrière les barreaux. Jeudi, 398 sur le total de 400 détenus qui attendaient leur libération depuis le sommet de Charm El Cheikh, en Egypte, le 8 février dernier, ont pu enfin regagner leurs foyers. Les deux autres ont refusé de quitter leur cellule, leur durée de détention prenant fin dans quelques jours. Lors de ce sommet, le Premier ministre israélien Ariel Sharon avait décidé la libération de 900 prisonniers palestiniens. Un premier contingent de 500 détenus avait été relâché le 21 février. Les Israéliens ont imputé le retard de cette dernière libération à un attentat suicide à Tel-Aviv le 25 février, qui avait fait 5 morts. L'accueil des libérés a été très chaleureux. Une nombreuse foule attendait les bus qui transportaient ces revenants de l'enfer carcéral. Vingt et un ont été libérés à Erez, principal point de passage entre Israël et la bande de Ghaza. Au barrage de Beitounya près de Ramallah, les 77 prisonniers libérés ont été accueillis par des proches brandissant drapeaux et portraits du défunt leader palestinien Yasser Arafat. Avant de repartir chez eux, ils ont tenu à se rendre à la Mouqataâ, à Ramallah où ils se sont recueillis sur la tombe de feu Yasser Arafat décédé en novembre dernier. « Je ressens une joie teintée de tristesse car nous avons laissé derrière 8000 autres prisonniers qui souffrent plus que ceux de Guantanamo », a affirmé Majd Barghouthi, à qui il restait 80 jours à purger sur une peine de 16 mois. Selon le Club des prisonniers, principal association de défense des détenus palestiniens, 209 des prisonniers libérés avaient moins d'un an de leurs peines à purger et 191 avaient entre un et neuf ans à purger. Cet événement, présenté par Israël comme un geste de soutien direct à Mahmoud Abbas, a été minimisé par les Palestiniens qui réclament, ni plus ni moins, la libération de la totalité des 8000 prisonniers qui croupissent dans les prisons israéliennes. israël a décidé seul des critères de libération des prisonniers, refusant de libérer tous ceux qui sont impliqués dans des attentats ayant causé la mort d'israéliens.« Libérer des prisonniers renforce l'espoir et la confiance dans le processus de paix. Néanmoins, ce n'est pas suffisant. Tous les prisonniers doivent être libérés », a déclaré Tayeb Abdel Rahim, conseiller à la présidence. Mais comme à son habitude, le gouvernement israélien a mis du poison dans le miel, en annonçant la construction prochaine de 22 logements dans la grande colonie de Maale Adomim, en Cisjordanie occupée, qui vise à étrangler la ville sainte d'El Qods. Le président Bush avait pourtant réclamé, lors de sa rencontre avec le président Abbas, le 26 mai à Washington, l'arrêt de toute extension au niveau des implantations juives. La semaine passée, Israël avait décidé de démolir près de 88 maisons du quartier de Selouane, banlieue de la vieille ville, pour y bâtir un jardin. Selon les Israéliens, les maisons se trouvent sur un ancien site archéologique. Près de 200 familles palestiniennes se retrouveront alors sans abri. Cet acte inhumain fait partie d'un ancien plan israélien datant de 1977, dont le but est de vider la vieille ville de ses habitants arabes dans le cadre de sa judaïsation. La démolition des maisons de Selouane ne serait qu'une première étape. Abbas qui doit rencontrer Sharon le 26 juin, doit lui faire savoir, avec fermeté, que ses plans qui visent à accaparer la terre palestinienne ne peuvent aboutir à la paix.