Le gros des travaux du colloque consacré à Albert Camus, organisé samedi et dimanche au CCF à l'initiative de Yahia Belaskri, s'est déroulé la première journée qui a vu défiler sur l'estrade de la petite salle de conférences nombre d'universitaires et d'écrivains de renom, pour certains. Une première table ronde a réuni Christiane Chaulet-Achour, Maïssa Bey, Malek Alloula et Nouredine Saadi. La première, ayant déjà publié un ouvrage (Albert Camus, Alger) sur l'auteur de l'étranger, le roman qui allait asseoir sa réputation et le fera rapprocher un moment de Jean-Paul Sartre, a voulu détruire le stéréotype qui stipule, à cause de la Peste, qu'il n'aimait pas cette ville, théâtre d'une œuvre pourtant grandiose. Intervenant sur Albert Camus et Oran, l'universitaire algéroise, maintenant installée en France, a voulu montrer comment cette ville naissait et se créait au fil du récit. Avec Présence de femmes, Maïssa Bey, qui a également déjà publié aux éditions Chèvrefeuille étoilé des réflexions sur Camus intitulées L'ombre d'un homme qui marche au soleil, préfacées par Catherine, fille de l'écrivain, s'est intéressée cette fois aux femmes qui ont croisé le destin de cet homme sacré par une stèle érigée en 1961, un an après sa mort et comportant juste une citation : « Je comprends ici ce qu'on appelle gloire : le droit d'aimer sans mesure. » Le roman d'oran Malek Alloula revient sur le roman qui a fait connaître Oran dans le monde et son intervention était intitulée « Le labyrinthe et la peste : à Oran dans la familiarité de Camus. » Nouredine Saadi aborde également, de son côté, l'écrivain et son récit oranais, mais pour décortiquer la part de l'Histoire. Une deuxième table ronde a été animée par Dallila Alloula. « L'antériorité latino-algérienne était la préoccupation de Amina Azza-Bekkat qu'elle étudie sous le regard de l'écrivain connu pour avoir beaucoup écrit sur Tipaza et d'autres enclaves antiques. Se basant sur les thèses de l'intellectuel Edward Saïd, Ieme Vander Poel aborde Camus dans un contexte colonial mais aussi postcolonial. L'école d'Alger (controversée quant à son existence du point de vue littéraire), ayant réuni autour de l'éditeur Edmond Charlot des écrivains vers la fin des années 1930 et le début des années 1940, a fait l'objet d'un film documentaire projeté la même journée. Cette école a été abordée par Jean Claude Xuereb dans une intervention intitulée « les rencontres de Sidi Madani et l'école d'Alger ». José Lenzini, dans l'Algérie essentielle de Camus, s'est intéressé peut-être à tout « ce qui est tu » (Malraux repris par Maïssa Bey) dans l'œuvre de Camus. Comme pour cette dernière, il est question d'une meilleure compréhension, peut-être une réhabilitation, en mettant un peu d'humanité dans un mythe, celui d'une œuvre qui n'a pas tout dit.