La réunion de l'Opep tenue mercredi 15 juin à Vienne a été l'événement marquant de la semaine. Programmée comme une rencontre extraordinaire depuis la réunion ordinaire tenue à Ispahan, en Iran, au mois de mars, la réunion devait permettre à l'Opep de faire une évaluation de la situation du marché et prendre la décision qui s'imposait, selon les termes généralement utilisés en la circonstance par les ministres du Pétrole.Inquiète, dans un premier temps, par la hausse des stocks qui commencent à se reconstituer et qui aurait pu avoir un effet sur les prix en provoquant une baisse, l'Opep s'est finalement ravisée en constatant que la demande en pétrole brut restait forte, notamment en Chine, mais aussi aux Etats-Unis. Après avoir entrevu la possibilité d'une réduction de la production après un léger mouvement baissier des prix au mois d'avril, l'Organisation a finalement décidé d'anticiper sur la forte demande qui s'annonce au 4e trimestre. C'est ce qui explique l'augmentation du plafond de production lors de la réunion extraordinaire du 15 juin vu que les prix ont été soutenus par des inquiétudes sur la demande en essence sur le marché américain et des craintes quant à l'approvisionnement du marché mondial durant le 4e trimestre 2005, période où la demande est en forte hausse à cause de l'hiver. Selon le rapport mensuel pour le mois de mai 2005, publié par l'Opep jeudi 16 juin, la production globale des onze pays membres de l'organisation a été de 28,217 millions de barils par jour alors que le plafond était de 27,5 mbj. La production de l'Irak, qui n'est pas concerné par les quotas, a été de 1,804 million de barils par jour. Ce qui donne une production globale de 30,021 mbj pour les onze pays. Durant ce même mois de mai, l'Algérie a été créditée d'une production moyenne de 1,340 million de barils par jour. En termes d'approvisionnement, l'offre actuelle est suffisante. Ce sont les problèmes du marché américain de l'essence, vu la faiblesse des capacités de raffinage dans le monde, qui soutiennent des prix forts. La tension étant encore alimentée par les fonds d'investissements qui spéculent fortement sur le pétrole brut en tant que matière première à fort rapport. Le même rapport considère que la demande mondiale de pétrole brut sera de 85,91 millions de barils par jour durant le 4e trimestre 2005. Les pays producteurs de pétrole brut non-Opep produiraient 55,30 mbj tandis que l'Opep devra produire 30,61 mbj afin de répondre à cette demande. quantités nouvelles A la veille de la réunion du 15 juin, le président de l'organisation avait déclaré que l'Opep allait produire de 30,5 à 31 millions de barils par jour au cours du 4e trimestre afin de répondre à la forte demande durant l'hiver. Les quantités nouvelles de pétrole devraient provenir de l'Arabie Saoudite qui déclare détenir une capacité supplémentaire de production de 1,5 mbj, mais qu'elle ne trouve pas de clients. En réalité, le pétrole brut trop lourd n'est pas très demandé par les raffineurs vu les difficultés qu'il y a à le transformer et vu aussi les exigences environnementales de plusieurs Etats sur le marché américain. Le Koweït et les Emirats arabes unis sont les deux autres sources d'où proviendront les quantités additionnelles, selon le ministre koweïtien du Pétrole qui préside l'organisation. Pour éviter une situation de pénurie de pétrole brut, l'organisation a décidé de continuer à produire au rythme actuel pour renflouer les stocks et prévoit d'augmenter la production dans les mois à venir avec une option supplémentaire de 500 000 b/j en plus de l'officialisation de la production réelle avec la hausse du plafond à 28 mbj. La deuxième augmentation interviendrait dans le cas où les prix restaient à un niveau élevé d'ici la prochaine conférence ordinaire prévue le 19 septembre à Vienne. Selon le communiqué officiel, « la conférence des ministres a de plus autorisé le président à mettre en œuvre, après consultation des pays membres de l'organisation, une deuxième hausse de 500 000 b/j avant la prochaine conférence ministérielle, si d'ici là les prix restent élevés ou s'ils augmentent encore ». Si la décision d'augmenter le plafond n'a pas eu d'effet sur les prix, c'est parce que les 500 000 b/j ajoutés étaient déjà sur le marché, l'Opep n'ayant fait qu'officialiser la production réelle. Et même l'option en plus de 500 000 b/j à ajouter n'a pas eu d'incidence. Les prix sont restés fermes et ils ont même augmenté à l'annonce mercredi de la baisse des stocks de pétrole brut américains, soit juste après la décision de l'Opep. évolutions du marché Un problème au Nigeria a encore fait évoluer les prix vers la barre des 58 dollars le baril. Depuis mercredi, les prix ont gagné 2 dollars le baril environ. L'annonce de l'enlèvement mercredi 15 juin de six employés d'une compagnie parapétrolière travaillant pour le groupe Shell dans le sud du Nigeria a eu une influence directe sur les cours vu l'importance de la production pétrolière du Nigeria et la qualité de son brut. Vendredi, sur le marché new-yorkais, le baril de pétrole a même battu un nouveau record historique à 58,60 dollars en séance et a clôturé à 58,47 dollars. Le précèdent record datait du 4 avril avec 58,28 dollars le baril. A Londres, le brent aussi a battu un nouveau record à 57,95 dollars en séance avant de clôturer à 57,76 dollars le baril. Avec ce mouvement haussier à la veille de l'été, la perspective d'un baril à 60 dollars dans quelques mois entrevue par plusieurs analystes du marché n'est pas à exclure. L'action de l'Opep étant considérée comme une contribution qui évite aux prix d'aller plus haut encore afin de ne pas hypothéquer la croissance de l'économie mondiale. Une action qui essaie de calmer le marché et lui éviter d'aller vers des seuils incontrôlables.