Abd Jassem Saïdi a enseigné la littérature à l'université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou pendant deux ans (1981-1983) et, pourtant, je ne l'ai connu qu'en octobre 2001, quand il a été invité par les organisateurs du colloque Abdelhamid Benhadouga de Bordj Bou Arréridj. Tout de suite, nous avons sympathisé. Affable, généreux et érudit, Abd Jassem Saïdi ne laisse personne indifférent. Dans le cadre des activités de son association La culture arabe, il m'invita à Londres en octobre 2002 pour donner une conférence sur la littérature algérienne à la salle Arts et cultures arabes. A Londres, j'ai découvert que la personnalité de Abd Jassem Saïdi, d'apparence joyeuse, cachait une profonde tristesse. Intellectuel irakien, communiste, il a été condamné à mort, en 1972, par l'ex-régime baâthiste de Saddem Hussein. Il a fui la liquidation physique et laissé errer ses pas à l'aventure amère de l'exil. Durant mon séjour en Angleterre, j'ai vu Abd Jassem Saïdi, à plusieurs reprises, pleurer à chaudes larmes. L'Irak, son pays si cher à son cœur, lui manquait terriblement. Malgré sa profonde tristesse et les affres de l'exil forcé, Abd Jassem Saïdi a toujours milité pour la démocratie en Irak sans intervention étrangère. De plus, son érudition, son esprit large et sa générosité ont fait de lui un militant des causes justes de tous les peuples en général et celles des peuples du monde arabe en particulier. En effet, depuis son installation à Londres, en 1985, il n'a pas perdu son temps. Il a créé L'association de la culture arabe qui est devenue grâce à ses efforts généreux et à son abnégation une association internationale. Avec l'aide de ses amis exilés (dont des Algériens de gauche) en Angleterre, il a organisé beaucoup de rencontres, de journées d'étude et de séminaires. Abd Jassem Saïdi a été aussi l'un des rares intellectuels arabes à avoir soutenu le peuple algérien dans sa lutte juste pour éradiquer le terrorisme islamiste. En octobre 2000, il a organisé à Londres par le biais de son association un colloque international « Les dimensions historiques et culturelles de la crise algérienne » sur l'Algérie meurtrie par le terrorisme. Il a invité à ce colloque des intellectuels et chercheurs du monde entier, y compris des Algériens (Ahmed Menour, Mohamed Sari, Abdelhamid Bourayou, Azradj Omar...). Il a aussi écrit un livre sur la poésie algérienne combattante. Quant à son pays l'Irak, il lui a consacré plusieurs ouvrages politiques et littéraires, sans compter les centaines d'articles qu'il a publiés dans les journaux arabes et anglais. Sur sa lancée, il a même fondé une revue La culture arabe dans laquelle plusieurs intellectuels arabes et étrangers ont publié des articles, des essais, des nouvelles, des poèmes et des chroniques. Depuis octobre 2004, Abd Jassem Saïdi ne répondait plus à mes lettres. Ses téléphones fixe et mobile sonnaient dans le vide. Le matin du 31 mai dernier, mon téléphone fixe sonna. J'ai décroché, Abd Jassem était au bout du fil. Quelle joie ! Après les mots de politesse, il m'informa qu'il était en Irak depuis octobre 2004. Nous discutâmes pendant quelques minutes. En conclusion, il m'a dit que l'Irak meurtrie a besoin de tous ses enfants pour se libérer des forces étrangères et des obscurantistes, construire sa démocratie naissante et conquérir de nouveau sa place parmi les nations libres et civilisées.