En cette matinée caniculaire de jeudi, le local de l'association est bondé de monde ; pleurs d'enfants et joie des parents se mêlent dans un brouhaha indescriptible. On vient juste de terminer une campagne de circoncision pour 30 enfants du quartier. Les opérations de ce genre, l'association en a fait son credo depuis 1997, années de sa création. Cette année-là, une coopérative immobilière pour employés de la Sonatrach est érigée sur un terrain vague utilisé par les jeunes comme aire de football. Les citoyens, qui se sont sentis dès lors spoliés d'un espace qui était le leur, passèrent à l'action en créant cette association. Pêle-mêle, il y a le « plan vert » grâce auquel 2 500 enfants partent pendant l'été en bord de mer pour se prélasser et en même temps nettoyer les plages, d'où l'appellation écologique « plan vert ». Chaque été aussi, 150 enfants sont envoyés en colonie de vacances. Dans le même local, on distribue, sur ordonnances, aux plus démunis, des médicaments offerts par d'autres citoyens. L'association, avec l'aide du CRASC et de l'AFEPEC, a réussi à dresser une carte démographique du quartier et, du coup, de ses poches de précarité. D'après cette étude 1 500 ménages ont été recensés comme démunis. Des femmes d'intérieur sans ressources ont appris un métier manuel grâce au projet financé par l'Union européenne. Grâce à ce programme, l'association a pu louer un local à la Cité Djamel dans lequel une trentaine de jeunes apprennent la menuiserie, l'ébénisterie et la sculpture ; pour les femmes, c'est la broderie et la peinture sur soie. L'emmagasinement d'une grande quantité de pesticides dans les locaux presque désaffectés d'ASMIDAL est un problème majeur pour les habitants du quartier, dira-t-il. Et le centre de distribution de NAFTAL qui approvisionne toute la partie ouest du pays, avec 1, 6 million de litres de lubrifiant par jour est une autre préoccupation qui doit mériter toute l'attention des autorités, dira-t-il encore. Pour Hmida Kassem, ancienne gloire du MCO et natif du quartier, « NAFTAL nous a amputé d'un très grand terrain qui nous revient de droit. L'affaire est entre les mains de la justice pour que ce terrain vague, clôturé sur un périmètre de 477 mètres, puisse être utilisé comme un stade de football ». Le raccordement de certains ménages au gaz de ville et la construction d'aires de jeux, tout au long du troisième périphérique, font déjà partie des préoccupations de l'association. Avant 1997, la plupart des ménages étaient dépourvus de gaz naturel. Pour dire tout le travail de cette association qui a réussi à s'imposer comme une association de quartier. Les mariages, les décès, les fêtes de fin d'année scolaire, les tournois de football, les problèmes de voisinage... l'association qui se dit apolitique, n'hésite jamais à y mettre la main. Victor Hugo ou Tirigou est un quartier qui est né en 1895. La réalisation du chemin de fer reliant Oran au Sud du pays, via Mohammedia, a été lancée en 1911. Cette ligne ferroviaire a amené beaucoup de gens du Sud vers les faubourgs d'Oran dont Victor Hugo. La fabrique spécialisée dans la sidérurgie SNS (ex-Ducro), l'usine à gaz, les abattoirs, les grandes fermes des alentours, le dépôt de chemin de fer... employaient beaucoup de mains-d'œuvre bon marché habitant le quartier. Les années 1950, dans le cadre du plan de Constantine, le groupement de la Cité HLM a été érigé ainsi que la cité de recasement de Petit Lac. Pendant la Révolution, la famille Chougrani perdra 3 frères : Ali, Houari et El Hachemi. La bande à Attou et Boudifa est encore dans les mémoires. Les Tasfaout, les Boudifa, Hamlili, Benarmas, Soudani..., chaque famille issue du quartier lui a donné une légende de plus. Même Guerratto, le diplomate de l'Union européenne en place à Alger, est venu faire un tour à pied au quartier et visiter les locaux de l'association.