Le rapport présenté lors de la table ronde organisée en marge de la huitième journée de la section ordinale des médecins de la région de Constantine, tenue jeudi dernier au palais de la culture Malek Haddad, était on ne peut plus clair. L'augmentation exponentielle des coûts engendrés par les prescriptions médicales impose un rationnement des soins, devenu, selon le rapport, une nécessité pour tous les systèmes de santé où des solutions sont à envisager pour permettre de concilier les nouveaux impératifs économiques et les attentes légitimes en matière d'accès aux soins, devenus de plus en plus diversifiés. Animée avec le soutien du laboratoire des techniques de l'évaluation médicale, la rencontre, ayant regroupé tous les partenaires et parties concernés par les questions touchant l'évolution du système de santé, a été une opportunité pour amorcer un débat contradictoire, certes, mais constructif, afin de parvenir à un consensus général pour lutter contre l'abus de prescription médicale avec le devoir de servir au mieux les patients. Parmi les nombreux griefs exposés par les différents intervenants, on retiendra essentiellement la question du contrôle médical jugé onéreux par les associations des malades qui demandent sa suppression immédiate, alors que les représentants des caisses de sécurité justifient toujours le recours à ce procédé par les prescriptions jugées abusives de la part d'un nombre important de médecins. Ces derniers estiment qu'ils ont toujours agi en vertu de leur droit de libre prescription dans l'intérêt de leurs patients, alors que le représentant des chirurgiens dentistes saisira l'occasion pour s'indigner contre les décisions de non remboursement de certains médicaments par la CNAS. Les chiffres officiels présentés lors de la rencontre indiquent que le médicament est devenu le troisième bien de consommation en Algérie, après le pain et le lait, avec une moyenne de 19 dollars par habitant et par an. La facture d'importation des médicaments a atteint 700 millions de dollars pour l'année 2004, soit le tiers des dépenses globales de la santé. Du côté de la sécurité sociale, on estime que 52 millions d'ordonnances en moyenne sont remboursés annuellement, alors que les frais de remboursement des médicaments sont passés de 19,67 milliards de dinars en 2000 à plus de 40 milliards de dinars en 2004. Des chiffres qui ne cessent d'augmenter au moment où le système de sécurité sociale vit une réduction de la base contributive du fait de la restructuration de l'économie, ceci en sus d'un déficit toujours enregistré auprès des mauvais payeurs. « Si chaque partenaire défend ses droits et honore ses devoirs, nous arriverons à réduire de façon significative les abus dont nous sommes les uns et les autres responsables. Nous aurons fait un grand pas vers l'instauration d'une maîtrise médicalisée des dépenses et évité le recours à des maîtrises comptables restrictives de l'accès aux soins », dira en substance le docteur Bekkat Berkani de l'ordre des médecins d'Alger. Alors que la rencontre, première du genre, aura permis l'ouverture d'un dialogue entre médecins prescripteurs, médecins conseillers de la CNAS et associations de malades, beaucoup reste à faire pour parvenir à un compromis qui aura pour finalité de préserver une assurance maladie qui présente déjà les signes d'un essoufflement chronique.