Lorsqu'elle a été admise à la clinique privée d'El Biar, cette mère de quatre enfants ne savait nullement qu'après l'ablation de sa matrice due à une tumeur, elle allait se retrouver dans un état comateux, clouée sur un lit de l'hôpital Mustapha, à Alger, le ventre complètement ouvert souffrant d'un tétanos post-opératoire et d'une fistule urinaire. Comment une telle forme de tétanos, disparue depuis plus de 40 ans en Algérie, peut-elle refaire surface ? Dans quelles conditions cette sexagénaire a-t-elle été contaminée ? Aucun des médecins et chirurgiens rencontrés au service des urgences du CHU de Mustapha n'a pu donner les réponses. Leur seule conviction est que la malade l'a contracté « lors du curetage biopsique qu'elle a subi à la clinique d'El Biar probablement du fait d'instruments non stérilisés ». La nièce de cette malade, elle-même médecin, est convaincue de ce diagnostic. « Elle a fait une série d'analyses et d'examens et un curetage biopsique qui ont fait état d'une tumeur de l'utérus. Quinze jours plus tard, soit le 11 juin, l'équipe médicale a procédé à l'ablation de la matrice qui est un acte très banal, d'autant que le cancer n'était pas métastasé », a-t-elle déclaré. Mais sept jours plus tard, soit le 17 juin, elle commençait à avoir des vertiges accompagnés d'une faiblesse généralisée et du blocage de la mâchoire. « Nous l'avons emmenée à la clinique où elle a été mise sous oxygène. Ce sont les symptômes du tétanos d'ailleurs la malade ne réagissait plus au Vallium. En fin de journée, le médecin réanimateur m'a déclaré qu'il ne pouvait rien faire pour elle. Nous l'avons évacuée vers l'hôpital Mustapha. » Une fois au service des urgences, l'équipe médicale a confirmé que la malade avait le tétanos, associé à une septicémie, et à une fistule urinaire qui a causé l'éviscération de la plaie. Pour le docteur Ould Slimane, responsable de la clinique, « aucune preuve n'a été établie » quant à la contraction de la malade lors du curetage biopsique. « Nous procédons à quelque 3000 actes chirurgicaux par an et jamais nous n'avons eu de problèmes de ce genre. C'est vrai que les symptômes sont ceux du tétanos, mais il n'est pas prouvé médicalement que le germe a été contracté lors du curetage ou de l'opération d'ablation de l'utérus... ». Selon lui, « si c'était le cas, d'autres malades l'auraient contracté ». Le responsable a expliqué que la période d'incubation d'un germe de tétanos peut durer de 3 à 20 jours. « Les portes d'entrée de ce germe qui provient de la terre ou de souillures sont nombreuses. La malade aurait pu le contracter en faisant ses prélèvements de sang, ses injections, lors du changement des pansements... » Néanmoins, le docteur Ould Slimane s'est déclaré « vraiment confus » parce que, a-t-il noté, l'opération a « mal tourné ». « L'acte chirurgical a eu lieu dans les meilleures conditions, avec un des chirurgiens les plus compétents, mais les gens confondent toujours l'obligation des résultats avec l'obligation des moyens. La fistule urinaire est une des complications de l'ablation de la matrice. » Il a indiqué que son établissement a reçu deux missions de contrôle de la direction de la santé, et rien d'anormale n'a été constaté. « La réputation de notre clinique est la preuve de sa compétence », a-t-il conclu. Pourtant, l'état de santé de la malade ne cesse de se détériorer.