Wardia Gobrini est couturière, styliste et créatrice à la fois. Après des études commerciales, elle décide d'embrasser une carrière ayant trait au fil et au tissu. Elle aura l'opportunité d'apprendre les techniques de la coupe en France avec une modéliste chevronnée. En 1982, elle se spécialise dans la couture et la broderie traditionnelle. Sa passion est telle qu'elle entreprend des recherches et mène des enquêtes sur le costume traditionnel. Elle possède,d'ailleurs, une véritable bibliothèque personnelle. Wardia indique qu'elle détient probablement cette fougue de la couture de sa grand-mère maternelle qui était spécialiste des gandouras et des ceintures serties en « ndjoum ou kentir ». L'artiste, dit-elle, a recours, également à la richesse du patrimoine des autres nations pour enrichir toute création. Depuis, 1995, elle est membre des Artistes algériens. Mère de trois enfants, Wardia Gobrini avoue que depuis que ses enfants ont grandi, elle a pu développer à merveille sa créativité et se consacrer à une autre passion, celle de la fabrication de poupées en chiffon traditionnelles. Son penchant pour les poupées est tel qu'elle suit avec succès un stage de fabrication de poupée avec moulage de têtes et de corps rembourrés en ouate. Ainsi, depuis quelques années, elle crée des poupées, habillées de costumes traditionnels, représentants toutes les régions du pays. Elle demeure persuadée que la poupée, ce personnage emblématique, peut merveilleusement joué le rôle d'ambassadrice d'un art, d'une identité, d'une civilisation. Elle a participé à un défilé de mode en 2003, dans le cadre de l'Algérie en France et à plusieurs autres à Dubai et en Algérie. Depuis deux ans, la couturière a dû freiner sa cadence de rendement compte tenu de la maladie de son regretté mari. Elle cousait par intermittence sur stock. Pour ainsi dire, elle a repris, depuis quatre mois, son travail. Après vingt ans de carrière, Wardia avoue que son parcours bien qu'enrichissant n'a pas été de tout repos. Cependant, elle reconnaît que la tâche n'est pas aisée pour elle, car elle effectue un travail de sous-traitance. « Je suis pour ainsi dire au four et au moulin. Il m'arrive de faire la coupe, la broderie et de me pencher sur la création », indique-t-elle. L'artiste aux doigts de fée estime que la haute couture n'existe pas en Algérie. « Je ne voudrais pas être prétentieuse mais j'estime que la haute couture est synonyme de travail à la main. Or, ce qui se fait aujourd'hui est un travail monté à la machine. » A la question de savoir si la mode existe dans notre pays, elle répond sur un ton connaisseur que la mode occidentale est bien présente en Algérie. « Je m'inspire de la mode occidentale. Je me base sur le traditionnel avec une touche de modernisme. J'essaye par exemple de faire des “kamyenes” avec des manches plus longues. » Selon elle, le marché national est inondé d'une panoplie de tissus, mais la fibre n'est pas naturelle. Il y a beaucoup de polyester et de synthétique. La semaine dernière, la Radio algérienne a organisé un défilé de mode, signé Wardia Gobrini, en faveur de l'enfance abandonnée. En tout, ce sont pas moins de 80 tenues de ville et traditionnelles qui ont été présentées au public. Cette action de solidarité, dont une partie de la recette sera versée à l'association AAFB, argue-t-elle, est une initiative à plus d'un titre. « Après le décès de mon mari, j'ai pris conscience que les gens malheureux ont besoin des autres. Ces enfants abandonnés ont besoin de nous. »