Les parents d'élèves candidats malheureux au baccalauréat 2005 de la wilaya de Annaba n'en démordent pas. Depuis l'annonce des résultats, ils assiègent quotidiennement la direction de l'éducation et le siège de la wilaya. Multipliant les démarches auprès des représentants des différents titres de presse, et menaçant individuellement et collectivement de faire appel aux institutions internationales, ces parents démontrent qu'ils n'ont pas désarmé. Mais au-delà de ceux qui manifestaient pour la énième fois leur mécontentement en réclamant une autre correction des épreuves et des mesures d'urgence, c'est l'ensemble du système éducatif qui est remis en question. Plusieurs titres de la presse s'étaient faits l'écho d'une supposée magouille qui aurait eu lieu dans des établissements scolaires. « Il y a les grèves successives et la perturbation des cours dans les lycées. Résultat : nos enfants ont payé l'incompétence des gestionnaires en poste dans ce secteur. Nous avons tenté d'approcher le directeur de l'éducation, celui-ci nous a fermé la porte au nez. Une mère de famille a même été molestée. On nous a accusés d'avoir voulu forcer l'entrée du siège de la direction de l'éducation que nous aurions même tenté d'incendier. C'est tout à fait faux », a indiqué M. Mokdad, un parent d'élève soutenu par plusieurs pères et mères de famille. Tous s'étaient présentés à notre rédaction pour dénoncer, outre ce qu'ils ont estimé être la grande magouille de la correction du bac, la tentative de manipulation de leur mouvement de colère par la direction de l'éducation. Sous une casquette ou une autre, et dans une tentative de récupération du mouvement, des cadres de certains partis politiques leur ont affirmé leur solidarité. Depuis le début de l'année, Annaba cumule de manière exacerbée les handicaps sociaux. L'absence de toute réaction des institutions de l'Etat pour mettre un terme aux incompétences a entraîné l'accumulation de records sinistres de la désocialisation. La violence à l'école, le chômage, la délinquance, la consommation de la drogue et l'insécurité ont transformé la wilaya en un laboratoire de données explosives. Cette contestation de centaines de parents d'élèves risque, à court terme, d'avoir des répercussions néfastes sur l'ordre public. Ce court terme est déjà annoncé par le Cnapest. Ce syndicat multiplie déjà les contacts avec sa base et les enseignants pour préparer l'échec de la rentrée scolaire 2005/2006. Il aurait même planifié des mouvements de grève destinés à paralyser tout le système de l'éducation. Au même moment, à la contestation de la correction du bac est venue se greffer celle des jeunes universitaires chômeurs de longue date, demandeurs de postes d'enseignants suppléants, des sans-logis et des familles démunies. Dans l'entourage des décideurs locaux, l'on craint que cette nouvelle révolte des exclus et des défavorisés, passive jusqu'ici, ne se transforme en violence à la moindre occasion. Cette crainte ne les a pourtant pas amenés à tirer les enseignements du bilan négatif des actions de la direction de l'éducation de la wilaya. Alors que pareille situation exige une redistribution des rôles pour éviter l'explosion sociale, les autorités locales préfèrent partir en vacances. « Pour nous calmer, les pouvoirs publics ont annoncé que nos enfants recalés pourront s'inscrire dans un centre de formation professionnel sans avoir à subir un quelconque concours d'accès. Ils ont omis de préciser que le nombre de recalés étant très important, les places au niveau de ce type de centre bénéficieront encore aux privilégiés », a affirmé Mme Zahira B. Les bulletins scolaires des 3 trimestres 2004/2005 comportant les excellentes notes dans toutes les matières en main, cette mère de famille n'arrive pas à expliquer l'échec de sa fille au bac. « Ma fille a ramené les brouillons des épreuves. Ses professeurs les avaient vérifiés et lui avaient même prédit un bac avec mention », se lamente cette maman inconsolable. Encore une fois, sollicité pour des précisions sur toute cette situation, le directeur de l'éducation était aux abonnés absents.