Pour sa première prestation en Algérie, récemment sur les planches du Théâtre régional de Constantine, le luthiste égyptien Tarek Abdallah n'a pas laissé indifférent le nombreux public mélomane, venu apprécier et savourer une musique envoûtante savamment raffinée. Le récital organisé par l'école de musique Meya en collaboration avec Beït El Oud El Arabi couronne les activités intenses des deux stages d'initiation au luth assurés au siège de l'école à Constantine, respectivement par les Egyptiens Nehad Essayed et Tarek Abdallah sous la direction de l'illustre luthiste irakien Nasseer Shemma qui a créé un événement musical sans précédent à Constantine en se produisant à trois reprises durant l'année 2004. « Nous avons en tout quinze élèves, dont six filles qui suivent le même programme avec les mêmes méthodes appliquées à Beït El Oud El Arabi du Caire en Egypte pour la formation des solistes en luth à n'importe quel âge, s'étalant sur deux ans au minimum avant de poursuivre des cours de perfectionnement », nous confia Samir Louahouah, directeur de l'école Meya Music. « Nous comptons lancer une classe de luth pour dix jeunes la saison prochaine avec l'ouverture de Beït El Qanoun qui sera dirigé par l'Egyptien Saber Abdessatar », souligna notre interlocuteur. Sur la scène du TRC, Tarek Abdallah, la trentaine, fit son apparition pour donner une brève présentation de Beït El Oud El Arabi et du programme de la soirée. Il sera accompagné par huit élèves qui montent pour la première fois sur scène pour un spectacle musical avec leurs luths irakiens à six cordes. Le groupe entame par un salut musical tendre, convivial et affectueux pour Constantine, composé par Tarek Abdallah. Concentration totale des élèves sur le maître, ses gestes et ses signes. Le public, religieux, se laisse emporter sans retenue par la magie des cordes. Le jeune Karim Hizmoune enchaîne pour confirmer, encore une fois, ses talents à travers une promenade musicale parmi Les Palmiers, œuvre de Nasseer Shemma. Il sera suivi par un autre jeune prometteur déjà. En interprétant une partition musicale de Georges Michel, Abbès Bouras s'est dit très motivé pour suivre son chemin sur les traces de ses maîtres égyptiens, à l'instar de ses condisciples qui ont fait preuve d'une application exemplaire avant de quitter la scène sous les applaudissements nourris d'un public subjugué. « Nous avons travaillé d'arrache-pied durant les séances de cours avant de réaliser notre premier spectacle pour lequel nous avons tout fait pour qu'il soit une réussite. C'est un pari difficile que nous avons tenu avec fierté grâce à l'application du groupe et avec le mérite d'un maître et fin pédagogue qui s'est dépensé généreusement avec nous, tout en faisant preuve d'une maîtrise parfaite des méthodes d'enseignement », nous confiera Amina, membre de la troupe. Le reste du spectacle assuré par Tarek Abdallah, seul sur scène, fut un régal inégalé pour l'assistance qui découvrira les œuvres majeures des sommités arabes sacrées du luth telles Mes Souvenirs, composée en 1930 par Mohamed El Qasabji, celui qui fut un jour le compositeur attitré de la divine Oum Kaltoum, Touta de l'illustre Farid El Atrache et Aziza du grand Mohamed Abdelouahab. Ses talents de compositeur, Tarek Abdallah, l'enfant d'Alexandrie, les étalera à travers son œuvre Ouelli djai avant de clôturer par un vibrant hommage à Sayed Derouiche, l'autre enfant adulé de la ville natale de Cléopâtre. « La rencontre avec Constantine m'a beaucoup fasciné », avouera-t-il à la fin du spectacle. Ce ne fut qu'une première. Tarek Abdallah promet de revenir encore, mais avec des œuvres purement inspirées du patrimoine musical constantinois.