Photo : N. Hannachi De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Le public a, certes, dansé et «salsé», dans la soirée de jeudi dernier, avec Bailongo, ce groupe parisien chaleureux. Toutefois, les jazzmen sont restés sur leur faim. Formée d'une poignée de musiciens, dont deux vocalistes, le jeune Juan Manuel Crespo Colina et Diane Béatrice, soutenus par un orchestre typique de salsa et de Timba Cubaine, la troupe a fait danser le Théâtre régional de Constantine. C'est ce que voulaient la majorité des mélomanes, pour la plupart des couples d'étudiants : des rythmes et de l'énergie pour se détendre à quelques jours des examens. Bailongo a exhalé des sonorités purement cubaines avec la salsa traditionnelle et la timba constantina. «Je dédie cette salsa à l'Afrique», clamera la chanteuse munie de son guiro, instrument à percussions joué avec un racloir. Le TRC se transforme en piste de danse où les jeunes se trémoussent, savourant des airs de trompettes et de saxos embellis par des fonds musicaux ponctués par la conga et les timbales. Le théâtre archicomble a eu chaud avec la salsa de Bailongo. Mais l'écran géant placé à l'extérieur est resté orphelin. Par indifférence ou en raison de la baisse du mercure, la place de la Brèche n'était pas aussi chaude que le théâtre. Auparavant, le chanteur de BB Blues, groupe algérois qui se produisait jeudi soir, aura rendu un modeste hommage à Stevie Wonder… après avoir joué quelques standards du blues qui, en tout cas, ont trouvé un écho favorable au TRC. «On aurait aimé quand même qu'ils jouent leurs propres compositions. Du moins s'ils en ont», dira un jeune qui rend au passage un hommage à la troupe Illusion, fruit de DimaJazz, qui s'était produite la veille pour la première fois dans ce festival. «Ces jeunes ont au moins tenté une expérience en offrant au public un morceau de leur composition», renchérit-il. Mercredi soir, ce fut au «violoniste divin», comme on le surnomme en Inde, L. Subramaniam, de mener les mélomanes dans un long voyage. «Je fais de la globale fusion», dira-t-il, répondant à l'une de nos questions. C'est le novateur de la musique indienne carnatique qui renvoie à 4 000 ans avant J.-C. Il a été parmi les premiers à l'avoir revisitée et retranscrite selon des règles. En soliste avéré au violon, presque maître spirituel, il a envoûté les adeptes avec ses coups d'archet et ses musiques reflétant non seulement des airs de l'Inde mais aussi de ses contrées limitrophes. «Ma musique est un concentré de genres classique, traditionnel et moderne. Le jazz figure modestement dans mes compositions», dira-t-il, et d'ajouter : «Mes sources d'inspiration sont multiples, la neige, les montagnes, le vent…» Si les premières pièces de son spectacle, notamment Conversation qui s'apparente au style de la formation de Rondo Venezuano (troupe créée en 1980 s'inspirant de la musique baroque en introduisant quelques instruments modernes), ont charmé l'assistance, il n'en a pas été de même pour le reste. Le virtuose incontestable en face de ses percussionnistes accordait un cours de rythmique à notre sens plus approprié dans un master class que dans une soirée de jazz. La soirée verra, en outre, une surprise ! Une chanteuse de «Bollywood» a interprété une chanson de film sous les applaudissements du public. Subramaniam qui a sillonné une cinquantaine de pays, dont l'Islande et les Etats-Unis, n'a pas excellé lors de cette soirée dans le jazz, mais plutôt dans sa musique riche en modes et en rythmes qui a trouvé des appréciations diverses chez les mélomanes… «On veut toucher à tous les goûts…» justifiera l'un des organisateurs du festival.