Le Premier ministre britannique Tony Blair présidera, aujourd'hui, une importante réunion sur les moyens de renforcer la lutte antiterroriste qui regroupera le gouvernement, les partis de l'opposition et la police. Cette réunion intervient quelques jours après la tragique bavure qui a abouti à la mort de l'électricien brésilien Jean-Charles de Menezes, traité comme un suspect par la police et abattu de cinq coups de feu à bout portant vendredi dans une station de métro au sud de Londres. Lundi, la presse londonienne a fustigé le fait qu'on ait laissé le jeune homme, traité comme un suspect, prendre un bus pendant près de 5 km avant de tenter de l'arrêter. Elle s'est demandée aussi pourquoi Ian Blair, le chef de Scotland Yard, avait annoncé, dans un premier temps, que le jeune homme abattu avait « un lien direct » avec l'enquête sur les attentats terroristes du 21 juillet alors qu'il était complètement innocent. Parmi les mesures que doit prendre le gouvernement, figure la politique qui consiste à « tirer pour tuer afin de protéger » le public, a expliqué Ian Blair, qui n'a pas exclu, lors d'une interview avec Sky News, que d'autres personnes pourraient être tuées. « Une autre personne pourrait être tuée », a-t-il reconnu, avant d'ajouter : « J'espère que cela ne se reproduira pas. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour que les choses se passent correctement, mais ces décisions sont prises dans des circonstances terrifiantes. » Ian Blair a justifié la politique de « shoot to kill » (tirer pour tuer) adoptée par la police face au risque d'attentats-suicide. Les policiers visent la tête, a-t-il dit, parce que c'est la seule façon de garantir qu'une bombe éventuellement portée par le suspect n'explosera pas. D'autres mesures laissent aussi entendre que l'ère des prédicateurs extrémistes et autres réfugiés politiques qui ont fuit le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord et qui incitent au jihad contre l'Occident et leurs propre pays est révolue. Les Abou Hamza Al Masri, Abou Qatada, Omar Bakri et autres pseudo- imams et éléments du GIA et du GSPC n'auront bientôt plus le droit de résider sur le territoire britannique s'ils persistent dans leur discours haineux et dans leurs appels à l'exécration de leur pays d'accueil. Le gouvernement britannique est ainsi déterminé à mettre un terme à des années de laxisme durant lesquelles, par exemple, Abou Hamza Al Masri, l'ancien imam de la mosquée de Finsbury Park, dans le nord de Londres, pouvait signer impunément dans le bulletin El Ansar les communiqués du GIA revendiquant les meurtres d'intellectuels, journalistes, soldats, policiers, gendarmes et gens ordinaires en Algérie. Après les attentats du 7 juillet, la Grande-Bretagne a entamé une série de pourparlers avec des gouvernements du Maghreb et du Moyen-Orient pour la signature d'accords d'extradition. Un projet d'accord à d'ores et déjà été signé avec la Jordanie pour l'extradition d'Abou Qatada, un Palestinien considéré comme le chef spirituel d'Al Qaîda en Europe. Il est actuellement assigné à résidence après avoir été détenu pendant deux ans et demi dans une prison londonienne. La Jordanie et plusieurs pays européens ont demandé son extradition. Le ministre de l'Intérieur britannique, Charles Clarke, a également pris la décision d'expulser vers la France l'argentier du GIA, l'Algérien Rachid Ramda, considéré par la justice française comme le « financier » de la vague d'attentats commis en 1995 contre le métro parisien. Les nouvelles lois stipulent aussi que les docteurs de la foi et imams devront surveiller leur langage et leur enseignement. Les religieux de l'étranger qui souhaiteraient venir prêcher en Grande-Bretagne devront, eux, présenter un curriculum vitae irréprochable avant d'y être autorisés. Par ailleurs, les communautés exposées aux interprétations dévoyées et erronées de l'Islam seront soumises à une surveillance très étroite. Des unités speciales des services du contre-espionnage du MI5 seront deployées dans les régions où les risques de dérapage islamique sont les plus grands pour être au plus près des groupes vulnérables. C'est ainsi que quelque 300 agents parlant outre l'anglais, l'arabe, l'ourdou, le pachtoun et le kurde notamment, seront intégrés dans des « unités de contacts musulmans » et installés dans des « observatoires de quartiers ». Le but est de collecter des renseignements sur les groupes et les individus qui posent des problèemes. Le MI5 a aussi recruté de nouveaux agents pour mener à bien cette mission. Enfin, le Premier ministre britannique a également proposé d'organiser dès septembre une conférence internationale pour combattre l'extrémisme musulman à laquelle seraient invités « les principaux pays ayant des inquietudes à ce sujet ». Qui sème le vent...