Nous ne prenons pas en considération les informations données par la chaîne El Jazira. Mon père n'est pas mort. J'ai un grand espoir de le revoir parmi nous et ce qui nous rassure le plus, c'est le fait qu'aucun officiel, aucun ministre ne nous a contactés pour nous confirmer cette information », nous dira Moncef, fils aîné du diplomate algérien ALi Belaroussi, rencontré hier, vers 16h devant son domicile situé à Chevalley. Malheureusement, cinq minutes après, l'espoir pour Moncef de revoir son père vivant s'est estompé. Deux voitures, l'une transportant Ahmed Bejaoui, ministre des Affaires étrangères, et l'autre Abdelkader Messahel, ministre délégué auprès du ministre des Affaires étrangères, chargé des Affaires maghrébines et africaines, pénètrent à l'intérieur de la cité où habite le diplomate. Les journalistes accourent vers les représentants de l'Etat pour un complément d'information. Mine abattue, M. Bejaoui se contentera de dire : « Nous vous communiquerons la position de l'Etat via un communiqué. Pour le moment, nous nous sommes déplacés chez la famille Belaroussi pour lui présenter nos condoléances et celles du gouvernement dans son ensemble. » C'est donc officiel : les deux diplomates ont été assassinés. La nouvelle a ému et attristé toutes les personnes qui ont entouré Moncef et qui n'ont cessé de lui remonter le moral dès l'annonce de l'exécution de son père. Toutefois, Moncef, avec un courage exemplaire et tête haute, accompagne les deux ministres jusqu'à l'intérieur de la maison située au quatrième étage. Les trois sœurs de Moncef, qui guettaient la moindre information, ont immédiatement compris. L'une d'elles lance à l'égard des ministres qui ont accompli leur mission : « Tant que le corps de mon père n'est pas rapatrié, je n'accepte ni les excuses ni les condoléances de l'Etat. J'exige la dépouille de mon papa pour l'enterrer dans notre pays et parmi les siens. Mon père est un chahid. » Avec une grande sérénité, la fille ajoute : « Nous avons supplié mon père de ne pas se rendre en Irak, pourquoi vous l'avez alors obligé à partir ? L'Etat est responsable de sa mort. » M. Messahel, tête baissée, les larmes aux yeux, n'a pu prononcer un mot. Il écoutait la fille qui exprimait sa colère. L'autre sœur de Moncef tentait de rassembler ses forces pour téléphoner à sa mère se trouvant actuellement en Jordanie, en vain. Pleurant à chaudes larmes, la fille réclame sa mère : « Maman, maman où es-tu ? » Reprenant son calme, la fille s'en prend aux autorités algériennes. « Aucun ministre, aucune personnalité, aucun responsable de l'Etat ne nous a contactés durant cette semaine de cauchemar pour nous consoler, nous soutenir. Aucune personnalité n'a été dépêchée chez nous, aujourd'hui, l'Etat a pris la peine de nous envoyer un émissaire, M. Bejaoui, pour qu'il nous annonce la mort de mon père. Est-ce que vous trouvez cette démarche logique ? », crie-t-elle. Des youyous fusent d'une autre pièce. « Mon père est un chahid, il a laissé derrière lui un homme. Moncef Belaroussi est son fils aîné qui est aussi responsable que lui », dira la plus jeune des filles. Moncef, calmement, a juste déclaré que le pouvoir était en contact permanent avec sa famille. « Je ne veux pas polémiquer, je pense fort à mon père, il était croyant, un homme intègre, gentil. Je crois en Dieu. C'est Dieu qui en a décidé ainsi et on ne peut pas fuir la volonté de Dieu. » Ces propos en ont ému plus d'un. Par ailleurs, le frère du diplomate, ému et bouleversé, n'arrive pas à comprendre la réaction du peuple irakien qui n'a absolument rien fait pour aider les Algériens. « Les Algériens ne sont pas des taouaghit, nous sommes des musulmans, nous ne sommes pas des terroristes et le monde entier doit comprendre cela. Nous soutenons le peuple irakien et il nous a lâchés dans des moments difficiles. Il n'a pas réagi face à l'enlèvement des deux diplomates algériens. Il ne s'est pas prononcé. Ce fait est impardonnable et le perdant, c'est inévitablement le peuple irakien », dira-t-il.