Oubliant ou feignant d'oublier que la liste des pays nucléaires ou ceux qui le sont potentiellement comporte bien des omissions et à ce stade, elles ne peuvent être que volontaires, des pays continuent à orienter l'attention sur l'Iran qui revendique le droit à l'énergie nucléaire bien que, soit dit en passant, ses arguments sur la question ne sont pas irréfutables. Comme ses réserves en pétrole estimées à plus d'un siècle et qui dissuadent la recherche nucléaire bien plus coûteuse. Ces pays mettent en avant le risque d'agression contre Israël, mais refusent de reconnaître l'existence de l'arsenal nucléaire israélien, bien réel celui-là puisque les experts estiment qu'Israël dispose de plus de deux cents têtes nucléaires. Parce qu'il y a un black-out international sur cette question, celle-ci n'est même pas soumise aux recommandations du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) et des inspections de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Et comme un mauvais feuilleton de l'été, et alors que le président élu iranien entame aujourd'hui son mandat, il a eu droit hier à une sévère mise en garde de la part de la France. Le chef de la diplomatie de ce pays estime que cette affaire iranienne est très grave, « elle peut être au départ d'une crise internationale majeure, car si l'Iran ne revenait pas sur cette décision, alors l'Iran serait dans une position purement unilatérale ». L'Iran a maintenu hier sa décision de poursuivre les travaux pour la reprise d'activités nucléaires ultrasensibles malgré la menace du Conseil de sécurité de l'Onu, mais a affirmé hier sa volonté de poursuivre les négociations. « De manière unilatérale, les Iraniens ont décidé hier de nous faire savoir (...) qu'ils allaient recommencer les activités de conversion de l'uranium. Cela nous paraît être un prétexte pour prendre une décision unilatérale », a déclaré M. Douste-Blazy, évoquant la perspective d'éventuelles « sanctions » du Conseil de sécurité de l'ONU contre l'Iran. « Nous proposerons, nous les Européens, qu'il y ait une réunion extraordinaire le plus rapidement possible du Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), pour demander à la communauté internationale de dire et de spécifier très fortement et très fermement aux Iraniens qu'il faut revenir à la table des négociations », a dit le ministre français. « Si les Iraniens n'acceptaient toujours pas ce que leur proposerait le Conseil des gouverneurs, alors la communauté internationale devrait saisir, me semble-t-il, le Conseil de sécurité » de l'ONU, et « on verra alors quel type de sanctions on donne à l'Iran ». Peu auparavant, le Premier ministre français Dominique de Villepin avait appelé l'Iran à tenir « les engagements qui ont été pris ». Dans le cas contraire, « il faudra que la communauté internationale en tire toutes les conséquences (...), et ce sera la saisine du Conseil de sécurité si l'Iran n'obtempère pas ». Insensibles à ces mises en garde, les Iraniens poursuivent les préparatifs commencés lundi pour un redémarrage de l'usine de conversion d'uranium d'Ispahan (centre). « La décision a été prise. Le travail a commencé », a souligné le président sortant Mohammad Khatami, qui quitte ses fonctions aujourd'hui. L'Iran a informé l'AIEA lundi de sa décision de redémarrer l'usine, qui doit convertir le « yellowcake » (concentré de minerai d'uranium) en gaz ensuite introduit dans les centrifugeuses pour produire l'uranium enrichi. Cette initiative risque de ruiner les négociations menées depuis décembre avec l'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne (UE3). La meilleure garantie pour l'UE3, c'est que l'Iran renonce définitivement à l'enrichissement d'uranium. Hautement enrichi, l'uranium peut servir à confectionner l'arme nucléaire. Les Etats-Unis, l'Europe et l'AIEA ont appelé l'Iran lundi à ne pas mettre sa décision à exécution. Les Européens ont exhorté les Iraniens à ne pas mettre en danger les négociations. Ils leur ont rappelé les propositions détaillées de coopération qu'Allemands, Britanniques et Français entendaient leur soumettre avant le 7 août pour les convaincre de maintenir une suspension totale de l'enrichissement. Dans sa lettre à l'AIEA, l'Iran accuse l'UE d'avoir voulu lui imposer le « fait accompli » d'un renoncement définitif à l'enrichissement d'uranium. Il dit qu'en huit mois de négociations, il « a très peu obtenu en retour (de la suspension), sinon rien ». Voilà un cas de dialogue de sourds, du moins une bien sérieuse controverse qui peut aller très loin. Et l'on peut s'interroger à cet égard sur la réaction du Conseil de sécurité s'il venait bien entendu à être saisi.