La situation demeurait confuse hier à Nouakchott après le coup d'Etat perpétré par des éléments de la Garde présidentielle. Ce petit pays de moins de trois millions d'habitants est en passe de battre tous les records d'instabilité enregistrant trois tentatives de coup d'Etat en moins de 15 mois. Le président mauritanien Maaouiya Ould Taya, qui a dirigé le pays d'une main de fer pendant un quart de siècle, a été cette fois-ci trahi de l'intérieur même du système par sa Garde présidentielle censée constituer son bras séculier. La rébellion n'est pas venue des officiers impliqués dans de précédentes tentatives de coup d'Etat. Pas plus qu'elle n'est venue des islamistes qui donnent aussi bien des soucis au régime en place. Le coup d'Etat qui vient de secouer le régime du président Maaouiya est d'autant inquiétant pour la survie du système que tout laisse croire que le ver est désormais dans le fruit. En attendant de voir plus clair dans ce mouvement de sédition qui s'amplifie et gagne les cercles les plus proches du Président mauritanien, il apparaît, selon toute vraisemblance, que les jours du règne de Maaouiya sont désormais comptés. Le Président mauritanien qui se trouvait en Arabie Saoudite pour assister aux funérailles du roi Fahd suit les événements à partir de Niamey d'où il espérait pouvoir rétablir la situation. La partie ne semble pas aisée pour lui cette fois-ci dans la mesure où les forces armées et de sécurité qui lui sont restées loyalistes lors des tentatives de putsch successives ont basculé avec armes et bagages dans le camp des putschistes. Un comité militaire chargé de diriger le pays pendant une période n'excédant pas deux ans avant de remettre le pouvoir aux civils a été mis sur pied hier. Le communiqué du comité militaire rédigé au nom des forces armées et de sécurité justifiant le coup d'Etat par la volonté de mettre fin « aux pratiques totalitaires » du Président renversé indique bien que Maaouiya a perdu la confiance y compris des siens : de l'armée dont il est issu et qui l'a servi plus ou moins loyalement pendant un quart de siècle avant de se retourner contre lui. Il reste à savoir comment ce coup d'Etat sera apprécié par la communauté internationale et principalement par l'Union africaine. Les coups d'Etat sont aujourd'hui passés de mode et bannis dans les relations internationales. Maaouiya rejoint le lot des chefs d'Etat africains vissés à leurs fauteuils qu'ils n'ont quittés que contraints et forcés, soit par un coup d'Etat, soit affaiblis par la maladie ou suite à un décès.