Des tracts signés par un groupe islamiste interdit ont été retrouvés dans certaines villes. Les attentats à la bombe se sont multipliés au Bangladesh depuis quelques années et le pays semble s'installer dans l'insécurité. Hier encore, plus de 350 bombes de faible puissance ont explosé de façon quasi simultanée à travers tout le pays, faisant au moins 1 mort et 38 blessés. Des tracts signés par un groupe islamiste interdit ont été retrouvés dans certaines villes. Selon des sources policières, toutes ces bombes, étaient de fabrication artisanale et de faible puissance. Les engins avaient été placés près de stations de bus et de gares, de tribunaux et de bâtiments administratifs. A Chittagong et Barisal, les bombes artisanales ont explosé en différents lieux entre 11h et 11h15 (5h et 5h15 GMT), ont indiqué des responsables de la police de ces deux villes. Une personne a été arrêtée à Dacca avec des blessures à la main dues à une explosion, selon le chef de la police de la capitale Mizanur Rahman qui n'a pas donné plus de détails. Dans certaines villes, la police a indiqué avoir retrouvé des tracts écrits en arabe et en bangladais, portant le nom d'un groupe islamiste interdit, le Jamayetul Mujahideen, et appelant à l'instauration de la loi coranique dans le pays. « Les tracts disaient : ‘'le moment est venu d'appliquer la loi islamique au Bangladesh. Il n'y a pas d'avenir avec la loi humaine », a déclaré le commissaire Mazeedul Haq, de la police de Chittagong. « Bush et Blair soyez avertis et quittez les pays musulmans. Les jours sont finis où vous pouviez diriger des pays musulmans », est-il également écrit sur ces tracts, selon un haut responsable de la police de Barisal, Monirul Islam. Dirigé par une coalition gouvernementale comprenant même des partis islamistes, le Bangladesh est l'un des pays les plus pauvres de la planète. La coalition est formée de quatre partis politiques, dont deux islamistes, menée par le Parti nationaliste du Bangladesh (BNP) du Premier ministre Khaleda Zia. Le Jamayetul Mujahideen et un autre groupe radical, le Jagrata Muslim Janata Bangladesh, avaient été interdits en février après leur mise en cause dans des attaques à la bombe contre des organisations non gouvernementales et des lieux religieux. En mai dernier, l'Inde avait dans un rapport annuel de son ministère de la Défense mis en garde contre « l'influence grandissante » de l'islamisme radical au Bangladesh. Trois mois plus tôt, c'est la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice qui avait fait part à Mme Zia de ses « vives inquiétudes » après une nouvelle attaque visant le principal parti d'opposition, la Ligue Awami. Le pays a été le théâtre de plusieurs attentats depuis un an et la Ligue Awami, visée à plusieurs reprises, a accusé les extrémistes d'avoir pris le pays « en otage » et de vouloir « éliminer les forces laïques ». Le 27 janvier, un attentat à la grenade dans le nord-est avait fait cinq morts parmi des membres de la Ligue Awami, dont un ancien ministre des Finances. Début février, une bombe avait explosé dans le club de la presse de Khulna, arrachant la main d'un journaliste. En août de l'année dernière, 20 personnes étaient mortes dans un attentat à la grenade contre un rassemblement de la Ligue Awami qui, selon ses responsables, visait son leader, Sheikh Hasina Wajed. Dans ce pays d'Asie australe à 83% musulman, les islamistes aspirent à instaurer une authentique « République islamique » avec une constitution basée sur la charia. Même la nébuleuse, Al-Qaida, étend ses tentacules jusqu'au Bangladesh. Le mouvement Harakat El Jihad Islami de Bangladesh aurait même été créé en 1992 avec l'aide directe d'Oussama Ben Laden et ses membres se présentent eux-mêmes comme les « talibans du Bangladesh ». Ce groupe a revendiqué la responsabilité de l'attaque des locaux du gouvernement des états-Unis à Calcutta qui ont coûté la vie à cinq policiers en janvier 2002. Depuis le 11 septembre, des milliers de sympathisants d'Al Qaîda ont marché plusieurs fois dans les rues de Dhaka, notamment après les prières du vendredi, brandissant des affiches proclamant « Oussama est notre héros » et brûlant des effigies du président George W. Bush. Il faut noter que les partis islamistes ont été très discrets depuis 1971. Leur soutien à l'armée pakistanaise pendant la guerre d'indépendance avait décrédibilisé pour longtemps le mouvement Jamaât-i-islami, parti frère du Jamaât pakistanais. Une partie de leur discours a été repris par les régimes militaires successifs du général Zia Ur Rahman et du général Ershad, puis du BNP, ce qui n'a pas empêché l'émergence, encore timide, de partis islamistes, dont deux sont représentés au Parlement. La réputation d'intégrité de ces partis, leur important réseau d'écoles religieuses (madrassas), leur forte présence dans les mouvements de jeunesse ainsi que leur bonne implantation dans les campagnes laissent présager à moyen terme la formation d'une troisième force politique d'importance au Bangladesh.