L'Algérie est en train de sombrer dans le délire, l'intolérance et le ridicule à la faveur de cette campagne sur la « charte pour la paix et la réconciliation nationale ». En effet, un chef de daïra a refusé une salle de réunion à la LADDH parce que, a-t-il dit, elle est réservée à « ceux qui soutiennent le projet de réconciliation ». Avant lui, un triste sire, le chef de la CNEC, qui fait du commerce avec le sang de nos martyrs, recommande de voter pour le document présidentiel si on veut « aller au Paradis à côté de nos chouhada ». Mais les propos les plus graves ont été tenus par Bouguerra Soltani, le chef du MSP, lors d'un meeting à Tlemcen. Il a annoncé qu'après « le référendum, le président de la République prendra des mesures contre ceux qui rejettent la réconciliation nationale ». Même à l'époque du parti unique, nous n'avons jamais entendu des déclarations de ce genre. Si cela se confirme, on aura alors officialisé purement et simplement le délit d'opinion. Le successeur de Mahfoud Nahnah ne nous surprend cependant pas. C'est dans la nature même de l'islamisme. Il repose sur la haine et le rejet de l'autre, y compris par la violence. C'est une règle à laquelle le MSP ne peut pas déroger. Mais cela devient encore plus inquiétant dans la mesure où il est partie prenante du pouvoir. La Présidence de la République doit une explication aux citoyens algériens. Il est urgent qu'elle désavoue M. Soltani pour empêcher d'éventuelles rumeurs et spéculations. On connaît le pouvoir algérien autocratique, mais pas au point de vouloir faire la chasse aux sorcières. Après l'élection du 8 avril, des cadres ont été marginalisés parce qu'ils avaient exprimé leur opposition au candidat Abdelaziz Bouteflika. Certains ont même été purement et simplement démis de leurs fonctions sur la base de simples soupçons. Est-ce le même scénario qui va se répéter après le 29 septembre ? Rien ne serait étonnant dans un pays où le droit est bafoué en permanence et où il est difficile d'exprimer une opinion contraire sans essuyer les foudres du système.