Le vice-président de la commission chargé de la justice et de la sécurité se défend pourtant d'avoir voulu par ces mesures renforcer le dispositif juridique européen servant à renvoyer dans leur pays d'origine les étrangers indésirables. « Ce dispositif n'est pas une mesure pour la lutte contre le terrorisme, même si certains de ces points représentent un grand pas en avant dans la solidarité européenne et dans la lutte contre le terrorisme », a expliqué, jeudi dernier, à Bruxelles, Franco Frattini. Ces normes d'expulsion, ainsi unifiées, visent à parvenir à lancer une espèce de mandat européen qui signalera chaque immigré expulsé. « Si une personne est retenue dangereuse en Italie où elle est interdite d'entrée, il en sera de même, y compris en Lituanie », explique Frattini. Il va sans dire que les imams et les prédicateurs religieux seront les plus surveillés. Toutefois, plusieurs pays européens, comme la France et plus récemment la Grande-Bretagne et l'Italie, n'ont pas attendu ces normes communes pour procéder à des expulsions d'immigrés jugés « dangereux pour la sécurité intérieure ». Suite à quoi, plusieurs organisations de défense des droits des immigrés et des droits de l'homme avaient fustigé ces méthodes qualifiées d'illégales surtout qu'elles privaient les sujets éloignés de toute possibilité de recours administratif, comme le prévoient les conventions internationales en matière d'asile et d'immigration. En Italie, après les attentats du 11 septembre 2001 contre le World Trade Center, le ministère de l'Intérieur avait autorisé les préfets à signaler et à expulser, manu militari, tout immigré sur qui pesaient des doutes quant à son appartenance ou sa simple sympathie pour un groupe terroriste. Un Algérien, résidant à Rome depuis 12 ans, accusé d'avoir appelé à célébrer la prière du mort, en mémoire du cheikh Yassine, avait été expulsé, en avril 2004, du jour au lendemain, sur la foi d'un article publié par un journaliste connu pour ses « scoops alarmistes ». Ces expulsions retenues nécessaires et urgentes par les autorités italiennes, afin de prévenir des risques d'attentats et d'assurer la sécurité des citoyens, venaient s'ajouter aux expulsions massives qui se déroulaient au sud de l'Italie et qui, inlassablement, ramenaient sur les côtes libyennes les centaines de clandestins qui se déversent chaque année sur le littoral sicilien. Le fait insolite est que des Egyptiens, des Nigérians, des Somaliens... se retrouvaient chez Kadhafi, alors que les conventions internationales stipulent clairement que les Etats qui expulsent des immigrés en situation irrégulière sont tenus de les accompagner dans leur pays d'origine, une fois leur nationalité établie. Cette grave violation de la législation internationale avait poussé l'Observatoire européen sur le racisme et la xénophobie à reprocher aux autorités italiennes ces pratiques, surtout celles qui consistent à détenir les immigrés clandestins, en attendant l'expulsion, dans les tristement célèbres Centres de permanence temporaire, où ils vivent dans des conditions lamentables et sont victimes de maltraitance. Exposé aux critiques de l'opposition et des Ong, le gouvernement italien n'avait d'autre choix que de donner un cadre légal à ses opérations d'expatriement et ces normes européennes arrivent à point, y compris pour les autres pays membres, qui ne cachent plus leur intention de limiter l'immigration, notamment celle provenant des pays du sud de la Méditerranée. Le responsable de la Commission européenne, ancien ministre des Affaires étrangères italien, Frattini, avait appelé, la semaine dernière lors du meeting international de Rimini, « pour l'amitié entre les peuples » organisé par le mouvement ecclésial Communion et libération, à ce que « l'expulsion des immigrés suspectés d'être des terroristes doit devenir une stratégie européenne, commune à tous les Etats membres ». Appelant les pays de la rive sud à une meilleure participation aux politiques d'expulsion, Frattini a promis des « aides économiques plus consistantes » à ces pays pour mettre au point « une prévention de la part de la police sur les lieux à partir desquels les terroristes potentiels pourraient partir ». Selon le vice-président de la Commission européenne, plusieurs terroristes réussissent à s'infiltrer parmi les candidats à l'immigration clandestine pour arriver en Europe. En attendant le prochain sommet européen sur l'immigration économique qui se tiendra en décembre prochain, Frattini exprime son désir de voir instituer « un jurement de fidélité » envers le pays européen où ils résident, même s'ils ne jouissent pas encore de la nationalité.