L'augmentation des prix du sucre constatée ces derniers jours sur le marché national n'est certainement pas l'effet d'un hasard. Elle n'est pas due, non plus, à une quelconque pénurie ou à la flambée des prix du pétrole sur le marché international comme certains l'expliquent. La raison est que le système First In First Out (FIFO) - qui veut dire : premier arrivé premier servi -, appliqué dans le cadre de l'accord d'association signé avec l'UE, a engendré le rush des importateurs algériens sur ce produit, ce qui s'est traduit par une hausse sensible du prix du sucre blanc et roux au niveau des marchés boursiers. C'est du moins l'explication fournie par le PDG de Cevital, Issaâd Rebrab, lors d'un point de presse organisé hier à Alger. Pour rassurer les consommateurs, le patron de Cevital dément les informations, selon lesquelles le prix du sucre atteindra 70 DA le kilo et annonce par là même que son entreprise « procèdera durant le Ramadhan à une opération promotionnelle en baissant le prix du sucre blanc », comme cela a été fait l'année dernière pour l'huile végétale. L'entreprise s'engage, en outre, à commercialiser, avec le concours de l'Enasucre 2200 t de sucre par jour « pour stabiliser rapidement le marché national du sucre », souligne M. Rebrab. Un marché actuellement déséquilibré par des pratiques spéculatives qui n'ont fait qu'aggraver les incidences négatives de la méthode FIFO dans le cas spécifique du sucre. Se voulant plus précis, le PDG de Cevital dira, au sujet de la spéculation, que l'entrée en vigueur de l'accord d'association avec l'UE « a entraîné au début du mois d'août un destockage du sucre blanc par les distributeurs pour se prémunir d'éventuelles baisses de prix de ce produit du fait de l'exonération totale de droits de douanes ». Aussi, poursuit-il, il a été constaté « une rétention des stocks de sucre blanc par les importateurs pour susciter une hausse de prix en période de forte demande et faciliter l'écoulement des quantités acquises hors contingent ». Selon le patron de Cevital, le marché national est suffisamment alimenté en sucre puisque en l'espace de 12 jours (du 1 au 12 septembre), l'offre sur le marché a atteint 75 000 t (soit le double de la demande nationale), dont 50 992 t importées en exonération de l'UE et 24 419 t commercialisées par son entreprise à 37 DA le kilo. Chiffres à l'appui, M. Rebrab dira que sur le marché international, « le rush de demandes d'achat émises par les importateurs nationaux a provoqué une surchauffe du marché boursier de Londres, faisant évoluer la cotation du sucre blanc de près de 30 dollars entre les 9 et 30 août ». Ces achats importants effectués sur une courte durée « ont entraîné aussi un surcoût du fret maritime de près de 25 dollars la tonne », affirme encore M. Rebrab. Revenant sur l'accord d'association signé avec l'UE, le patron de Cevital n'a pas manqué de relever les points qu'il considère comme étant « des avantages énormes accordés aux pays européens sans contrepartie » et constitue à ses yeux « une concurrence déloyale ». En effet, en vertu de cet accord, l'UE bénéficie d'un contingent de 150 000 t de sucre blanc à l'exportation vers l'Algérie à 0% de droits de douanes. Cependant, l'Algérie ne bénéficie pas d'une mesure réciproque et le producteur national de sucre « est assujetti pour ses importations de matière première (sucre roux) à 5% de droits de douanes ». De plus, ajoute M. Rebrab, « l'UE subventionne son sucre à l'exportation à hauteur de 70% de sa valeur sur le marché domestique, soit près de 400 euros la tonne ». Tout en avouant devoir respecter tout de même l'engagement de l'Algérie, M. Rebrab suggère, cependant, que la mise en œuvre du contingent pour le sucre blanc « soit suspendue jusqu'à l'obtention de l'UE d'une réciprocité permettant aux exportateurs de sucre blanc d'Algérie de bénéficier des mêmes conditions ». Qualifiant le système FIFO de « méthode spéculative », M. Rebrab propose enfin d'abandonner cette méthode et de « mettre le contingent du sucre à la disposition de l'Enasucre pour réguler le marché ou de vendre les quotas par adjudication afin de limiter les importations au contingent arrêté et de permettre aux importateurs d'effectuer leurs achats aux moments les plus appropriés ». Il faut dire que de telles mesures ne sauraient être prises par le gouvernement tant que la circulaire d'application du décret antidumping de juin dernier n'est pas encore signée.