Un jeune revendeur de cigarettes de la cité USTO ne s'attendait sûrement pas à une descente de la gendarmerie par un soir particulièrement calme. Il sera désagréablement surpris lorsque les éléments de la brigade d'Oran découvriront une faucille sous son étalage de fortune. « Bassitni ! » (Tu m'as compromis), s'exclamera-t-il pendant qu'on lui fait passer les menottes. A ce moment précis, il était 8h, il fait nuit noire et il y a encore beaucoup de gens, notamment des jeunes dont des mineurs qui s'agglutinent par groupes dans les coins des immeubles de ce vaste conglomérat de béton. La nouvelle est vite transmise. Un vieil homme arrive en courant et demande à parler au chef de groupe. « C'est moi le propriétaire de l'étalage. J'ai juste demandé à mon fils de me remplacer quelque temps », devait-il déclarer à qui voulait l'entendre. Des gendarmes le somment gentiment de se présenter au groupement pour tirer au clair cette affaire. Une femme d'un certain âge tentera d'intervenir dans le même sens, mais se verra rétorquer la même réponse. La présence de journalistes, visibles par leurs calepins, a quelque peu détendu l'atmosphère tandis que plusieurs autres éléments de la gendarmerie continuent la fouille systématique des revendeurs en tout genre mais aussi des jeunes pris au hasard. Un peu à l'écart, un homme, la soixantaine, évoque les années 1980 et le calme qui régnait dans sa cité. « Beaucoup de fléaux ont fini par s'ancrer ici et ce phénomène n'a fait son apparition qu'après la période de terrorisme des années 1990 », devait-il confier. Lui voudrait bien dénoncer certains délinquants mais il dit avoir peur des représailles. « Nous savons ce que nous faisons, car nous avons agi sur la base d'informations précises », devait déclarer un gendarme au sujet d'une arrestation. Un prévenu a essayé de protester, mais il a été forcé à monter dans le véhicule prévu à cet effet. Cette décente surprise de la gendarmerie fait partie d'une opération prévue pour la nuit du 1er octobre. Elle a été combinée avec les services des sûretés de wilaya et devait concerner simultanément non seulement les quartiers de la ville d'Oran comme Sidi El Bachir, El Hassi, Hai Es Sabah, Bir El Djir et Chteïbo (Nedjma) mais aussi quatre autres villes de l'Ouest : Mostaganem, Aïn Témouchent, Sidi Bel Abbès et Relizane. Une patrouille devait ensuite se diriger vers El Hassi, une des excroissances urbaines connue pour son habitat illicite, parfois précaire, située à la sortie ouest de la ville. A l'intérieur du groupement de l'unité de la garde communale, une dizaine de suspects ont été mis face au mur. La police devait aussi, apprend-on, opérer aux Amandiers, un quartier urbain situé pas très loin de là. A El Hassi, une impressionnante procession du corps de la gendarmerie devait ensuite sillonner quelques ruelles mais sans opérer d'innervations spectaculaires, mis à part la fouille de quelques jeunes à qui on a demandé le lieu de résidence pour s'assurer qu'ils ne sont pas étrangers au quartier. « Il y a un aspect préventif qui est mis en avant car, souvent, notre présence suffit pour dissuader les criminels », explique un officier qui atteste que ce genre de sorties, organisées à l'échelle locale, est fréquente. « Quand cela est nécessaire, l'aspect préventif peut devenir répressif, conformément au code pénal », devait préciser le lendemain lors d'une conférence de presse le colonel Belhadj, le nouveau chef du deuxième commandement régional de la Gendarmerie nationale. « Quand il s'agit de coordonner simultanément des opérations dans plusieurs wilayas, cela demande une préparation et un organisation plus élaborée », devait-il néanmoins préciser. La lutte contre la criminalité est devenue l'un des aspects les plus importants de ce corps de l'armée. La patrouille devait ensuite se diriger vers Hai Es Sabah, un nouveau quartier situé dans la commune de Bir el Djir. Il était environ 22h et l'activité commerciale n'a pas encore totalement cessé. A Oran, cette opération suivie en partie par les journalistes s'est soldée par l'identification par la gendarmerie de 226 personnes. On a procédé à 24 arrestations de délinquants devant être présentés devant la justice pour port d'armes prohibées (13), détention et consommation de stupéfiants (9), ivresse publique (1) et une personne déjà recherchée par la brigade. L'opération combinée (incluse l'intervention de la police) s'est soldée par l'examen de situation de 402 individus et l'arrestation de 48 personnes dont 27 pour port d'armes prohibées, 14 pour consommation de stupéfiants, 1 pour ivresse publique, 4 personnes pour être recherchées par les services de sécurité et deux pour mandat d'amener. Les mêmes délits sont enregistrés dans les autres wilayas concernées avec des variantes comme à Mostaganem où un individu a été appréhendé pour vol de sable (usage de tracteur) et une conduite en état d'ivresse. A Témouchent, l'opération a duré jusqu'à 1h et s'est soldée par l'identification de 599 individus dont 23 arrestations pour détention et consommation de stupéfiants (15) et de psychotropes (1). A Sidi Bel Abbès, l'opération a concerné les quartiers chauds et l'identité de pas moins de 799 personnes a été vérifiée. 23 personnes ont été arrêtées dont 1 était déjà recherchée par les services de la gendarmerie. Enfin, à Relizane, l'opération a duré entre 18 et 22h et 22 personnes sur 490 identifiées ont été arrêtées dont une pour vente illégale de boissons alcoolisées et 2 pour avoir effectué des transactions commerciales sans registre du commerce.