La transition épidémiologique qui s'opère depuis des années en Algérie vient d'être prouvée et établie par une enquête nationale réalisée par l'Institut national de santé publique (INSP). Les résultats préliminaires seront rendus publics à la fin décembre prochain. Cette étude sur la transition épidémiologique et l'impact sur la santé en Afrique du Nord (Transition health impact in North Africa (Tahina)) s'inscrit dans le cadre du projet de recherche financé par l'Union européenne. Elle a pour objectif de « renforcer la capacité des services de santé à gérer les problèmes posés par l'avancée de la transition épidémiologique à travers une stratégie globale, intégrée et multisectorielle, et augmenter l'attention à la prévention des maladies chroniques non transmissibles, de tous les secteurs concernés par les changements dans les modes de vie », souligne le docteur Atek, épidémiologiste, chef de département d'information sanitaire à l'INSP et coordonnateur scientifique du projet en Algérie, puisque ce dernier concerne aussi la Tunisie, la France et la Belgique. L'élaboration d'une stratégie d'intervention nécessite, selon notre interlocuteur, avant tout une enquête nationale en tenant compte de la santé de la population qui se mesure par différents indicateurs. Il est question, ajoute-t-il, d'analyser la mortalité, la morbidité hospitalière pour arriver enfin à l'analyse de la santé de la population par cette enquête qui s'est déroulée à travers 16 wilayas du pays, selon un indice global sanitaire. L'enquête sur la morbidité et les facteurs de risque des maladies non transmissibles, en cours de finalisation, a été menée du 11 juin au 7 juillet 2005. Elle a porté sur 5000 ménages dont 4500 adultes âgés entre 35 ans et 70 ans dans 16 wilayas, 6 strates et 64 communes. Selon le docteur Atek, cette enquête a été réalisée par des équipes pluridisciplinaires, dont des médecins formés au niveau de l'INSP. « Le contrôle et le codage de certaines variables ont commencé depuis le mois de septembre et se poursuivent actuellement. Les résultats définitifs seront normalement prêts d'ici la fin du mois de décembre ou le début du mois de janvier », nous dira le docteur Atek avant de préciser que le délai de réalisation de cette étude est fixé pour 2006. L'évaluation des causes de mortalité s'est faite sur un total de 13 358 décès survenus durant l'année 2002 à travers 12 wilayas, en tenant compte de la répartition sanitaire et des critères géographiques. La répartition montre que 56% des décès touchent le sexe masculin et 44% le sexe féminin, dont la proportion de décès la plus élevée est fréquente dans la tranche d'âge de 70 ans et plus, et 0-4 ans avec respectivement 38,7% et 23,7%. Le lieu du décès est généralement dans les structures de santé publique avec un taux de 53,7, 36,6% à domicile, et 2,4% sur la voie publique. Quant aux causes de décès, l'enquête a révélé que la proportion de 1 décès par maladies non transmissibles représente 58,6%. Les maladies transmissibles, maternelles, périnatales, nutritionnelles et les traumatismes représentent respectivement 22,7% et 10,6%. La proportion des causes de mortalité mal définies et inconnues est de 8,1%. Ainsi, les maladies cardiovasculaires constituent la première cause de mortalité avec 26,1% des cas suivies par les affections dont l'origine se situe dans la période périnatale avec 13,5%. Les tumeurs malignes, les traumatismes non intentionnels et les affections respiratoires représentent respectivement 9,4%, 6,9% et 4,5%. Le diabète sucré est retrouvé dans 4,4% des cas. L'analyse des groupes de maladies a montré que dans les maladies transmissibles, les affections périnatales représentent 59,6%, les maladies infectieuses et parasitaires 18,2%, les infections des voies respiratoires 10,4%, les carences nutritionnelles 4,2% et les affections maternelles 2,2%. Dans le groupe des maladies non transmissibles, les maladies cardiovasculaires représentent 44,5%. Concernant le groupe des traumatismes, les non intentionnels sont les plus représentés avec 65,2% et les traumatismes intentionnels 13%. A propos de la morbidité hospitalière qui a porté sur un nombre de 19 189 patients hospitalisés du 15 avril au 30 avril 2003, les résultats de l'enquête ont montré que les accouchements représentent 17,9% sur l'ensemble des hospitalisations, soit 3443 sur 19 189 hospitalisations. Le total de patients sans accouchements est de 15 746. La répartition par sexe montre que 46,3% des patients sont de sexe masculin et 53,7 sont de sexe féminin. Les 0 à 4 ans représentent 14,4% et les 15-44 ans 46,2%. Docteur Atek nous explique que, selon les chapitres de la CIM-10, grossesse, accouchement et puerpéralité représentent 27,1%, les maladies de l'appareil respiratoire représentent 10,7%, les maladies de l'appareil digestif 9,9%, les lésions traumatiques 7,1%, les maladies infectieuses et parasitaires 5,1%, les maladies de l'appareil circulatoire 4,9% et les tumeurs 4,6%. Sans accouchements, continue notre interlocuteur, les maladies de l'appareil respiratoire représentent 13%, les maladies de l'appareil digestif 12%, le chapitre grossesse et puerpéralité 11,2%, les lésions traumatiques 8,7%, les maladies infectieuses et parasitaires 6,3%, les maladies de l'appareil circulatoire 6% et les tumeurs 5,6%. L'analyse des motifs d'hospitalisation selon la classification GBD, la proportion des affections non transmissibles, sans les accouchements, occupe le premier rang avec 41,4%, suivie par le groupe d'affections de maladies transmissibles, périnatales, maternelles et nutritionnelles qui représentent 23,8%. La proportion des traumatismes est de 8,2%. L'enquête a aussi révélé que parmi les 10 premiers motifs d'hopsitalisation dans la tranche d'âge 0-15 ans, les infections des voies respiratoires et les affections périnatales présentent respectivement les proportions de 13,3% et 12,6%. Pour les 15 ans et plus, l'accouchement occupe le premier rang avec 22,5%, suivi par les lésions traumatiques et l'avortement avec respectivement 6,5% et 3,3%. Selon le docteur Atek, les données suivantes constitueront une base de travail pour présenter une stratégie d'intervention pour la prise en charge des pathologies chroniques. Il est question, d'après lui, de revoir les systèmes de santé par rapport à cette nouvelle donne épidémiologique.