La transition épidémiologique qui s'opère depuis des années en Algérie vient d'être prouvée et établie par une enquête nationale réalisée par l'Institut national de santé publique (INSP). Elle révèle le danger des maladies qui guettent les Algériens, qui étaient qualifiées de maladies des pays riches. Les accidents cardiovasculaires, les cardiopathies ischémiques, le diabète, les cancers et les maladies respiratoires font partie du quotidien des Algériens avec toutes les difficultés qu'ils rencontrent pour leur prise en charge. Les résultats de cette étude sur la transition épidémiologique et l'impact sur la santé en Afrique du Nord (Transition Health impact in North Africa ) Tahina ont été présentés, vendredi à l'ouverture des travaux du premier congrès national de médecine vasculaire, organisé par la Société algérienne de médecine vasculaire (Samev) au Palais de la culture. L'étude s'inscrit dans le cadre du projet de recherche financé par l'Union européenne. Elle a pour objectif de « renforcer la capacité des services de santé à gérer les problèmes posés par l'avancée de la transition épidémiologique à travers une stratégie globale, intégrée et multisectorielle, et augmenter l'attention à la prévention des maladies chroniques non transmissibles », a indiqué le Dr Atek, épidémiologiste, chef de département d'information sanitaire à l'INSP et coordonnateur scientifique du projet en Algérie, puisque ce dernier concerne aussi la Tunisie, la France et la Belgique. Après avoir présenté les indicateurs relatifs à l'analyse de la mortalité, la morbidité hospitalière dont les résultats ont été déjà publiés dans les précédentes éditions d'El Watan, le Dr Atek a présenté les résultats de l'enquête nationale de santé qui s'est déroulée entre juin et juillet 2005. Une enquête qui justifie, en fait, l'élaboration urgente d'une stratégie d'intervention. L'analyse des indicateurs relatifs à la santé de la population a porté sur 5000 ménages et un échantillon de 32 000 personnes âgées entre 35 et 70 ans dans 16 wilayas, 6 strates et 64 communes. Selon le Dr Atek, cette enquêté a été réalisée par des équipes pluridisciplinaires, dont des médecins formés au niveau de l'INSP. Dans l'analyse de la transition épidémiologique, il a été constaté une nette diminution des maladies infectieuses contre l'augmentation de maladies non transmissibles. Les maladies cardiovasculaires qui constituent la première cause de mortalité avec un taux de 26,1% sont en tête. L'enquête a révélé, en fait, qu'un Algérien sur quatre, âgé entre 35 et 70 ans, est hypertendu, surtout en milieu urbain, ce qui rejoint les estimations des enquêtes réalisées par la Saha et l'enquête Steep Wise (OMS). La prévalence de la haute tension artérielle (HTA) est aujourd'hui de 24,90%, selon l'enquête nationale. Il a été aussi remarqué que 12,21% des Algériens sont diabétiques avec une prédominance féminine et une forte prévalence dans les milieux urbains. Quant à la dyslipidémie qui touche aussi une forte population féminine, l'enquête a révélé que 14,51% de la population ciblée en souffrent. Les premiers facteurs de risques incriminés dans l'apparition de ces pathologies sont le tabac (11,5 %) et l'alcool (6,7%) avec une prédominance masculine. Le Dr Atek a souligné que les résultats de cette enquête, présentés pour la première fois, ont montré que l'âge moyen de la première cigarette est de 19 ans pour 14,84% des cas. Le régime alimentaire est aussi un des facteurs incriminés car, selon l'enquête, « les Algériens mangent mal ». Ils consomment 0,6 fruit alors que la norme est de 2 fruits minimum, 0,2 légume au lieu de 3 et les produits laitiers 1,3 alors que la norme étant de 2. En revanche, la consommation de légumes secs est de 3,8 alors que la norme est de 3 et les produits gras qui sont de 2,7 alors que la norme est de 1. A ce mauvais équilibre alimentaire s'ajoute la sédentarité. L'activité physique est faiblement représentée dans cette enquête. Les statistiques ont révélé que les Algériens marchent très peu avec une durée moyenne de 1,03 h et la position assise ou allongée de 2,42 h dont une heure devant la télévision et 7,32 h de sommeil. Concernant le choix des Algériens pour la consultation, les résultats ont montré que 87,73% préfèrent consulter le médecin généraliste puis le spécialiste (10%), « les femmes plus que les hommes optent pour le spécialiste ». Les structures sanitaires fréquentées sont en premier lieu les unités sanitaires de base (52%), les cabinets privés (39%) et en dernier les CHU (6,29%). Selon le Dr Atek, les données suivantes constitueront une base de travail pour présenter une stratégie d'intervention pour la prise en charge des pathologies chroniques. Il est question, d'après lui, de revoir les systèmes de santé par rapport à cette nouvelle donne épidémiologique. Par ailleurs, les travaux de ce 1er congrès de médecine vasculaire (Samev), qui a pour objectif, selon les organisateurs, de former les généralistes à la pratique d'un examen très simple qu'est le doppler continu, et pouvoir mesurer le TPS (indice de pression systolique) qui permet de détecter les arthériopathie oblitérantes des membres inférieurs (AOMI) se poursuivent, aujourd'hui, avec une série de communications sur la dyslipidémie et le diabète.