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Processus de privatisation
Le compte à rebours enclenché
Publié dans El Watan le 17 - 10 - 2005

La privatisation à partir de 1998 de la presque totalité des filiales du groupe Sider, l'ogre de la sidérurgie africaine des années 1970, a annoncé celle de beaucoup d'autres entreprises. Durant les six premiers mois de l'année 2005, ce sont 200 entreprises publiques économiques à avoir été cédées à des privés.
Asmidal, un des plus importants producteurs de produits pétrochimiques de la région, est la dernière en date. L'entreprise a été cédée au groupe espagnol Fertibéria.La mise en application de l'accord d'association avec l'Union européenne (UE) devrait accélérer le processus de privatisation en 2006. C'est à partir du siège du patronat français à Paris que, le 11 octobre 2005, M. Abdelhamid Temmar, ministre des Participations et de la Promotion des investissements, a annoncé la privatisation de 1230 entreprises. L'annonce avait été faite en présence de M. Yves Thibault de Silguy, président du comité Algérie de la branche internationale du patronat français, ainsi que des entrepreneurs français. M. Temmar était accompagné des PDG de 15 sociétés de gestion des participations (SGP). Sa sortie, qui se poursuit dans d'autres villes d'Italie, d'Espagne et du Portugal, confirme que les grandes manœuvres ont bel et bien commencé. Les contacts entre les entrepreneurs algériens et français se sont multipliés. Ils s'expliquent également par la perspective de la privatisation des grosses pointures de l'industrie algérienne et par des opérations en sous-main qui se trament déjà. Selon des économistes de l'université Badji Mokhtar à Annaba, ces opérations sont le prélude à d'importantes luttes d'influence dans les différentes SGP. Elles sont également à l'origine de l'ébullition qui caractérise ces derniers jours la place économique et sociale nationale. D'où cette expression actuellement à la mode dans le milieu économique quant à un compte à rebours enclenché pour l'accélération du processus de privatisation. Il devrait s'achever bien avant l'adhésion de notre pays à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Ce compte à rebours a entraîné de nombreuses réactions des travailleurs, dont les plus récentes sont ceux de l'IAP de Boumerdès et de PMA/MAGI Rouiba (production de matériel agricole et industriel). Hormis l'UGTA, dont les responsables semblent avoir troqué leur blouse de travail pour celle de la politique, les autres syndicats mobilisent leurs troupes. Ils répondent ainsi aux inquiétudes de leurs adhérents sur la décision de la puissance publique d'abandonner ses prérogatives à des intérêts privés. Actuellement, les passions sont exacerbées. Les rivalités entre travailleurs et gestionnaires sont ravivées, réveillant les angoisses des uns et les ambitions des autres.
Eviter les erreurs du passé
Dans les SGP, les responsables se mobilisent, peaufinent leur stratégie et s'organisent dans la perspective de cette accélération. Au département de Temmar, les réunions se sont multipliées. Les 55 milliards de dollars engagés par l'Etat dans le cadre du programme quinquennal de soutien à la croissance économique et le niveau positif de croissance atteint ces deux dernières années sont avancés à titre d'arguments. Les collaborateurs de M. Temmar planchent sur l'élaboration d'une première liste d'entreprises à céder sur les 1230 prévues. Ils se proposeraient de mener l'opération de cession avant l'été 2006 puis une autre à l'automne de la même année. « Ce défi ne saurait aboutir sans une volonté politique réelle de concrétiser une synergie entre l'appareil productif national existant et les opérateurs étrangers. Le président de la République avait affirmé récemment que les préférences algériennes iront vers les entreprises étrangères disposées à accompagner leurs fournitures de prestations par des investissements en Algérie ou des partenariats concrets et positifs. C'est là un des enjeux et défis de l'intelligence économique qui se définit comme l'ensemble des actions coordonnées de recherche, de traitement, de distribution et de protection de l'information utile aux acteurs économiques », estime M. Hamdi, cadre gestionnaire, économiste et chercheur à Annaba. Même si l'on a parlé de programme de modernisation du rail algérien, c'est avec en arrière-plan cette accélération du processus de privatisation en Algérie que s'est tenu récemment le 2e forum algéro-français. L'enjeu porte sur les 5 milliards de dollars investis par l'Etat algérien pour la modernisation du secteur des transports. Notamment le transport ferroviaire algérien. Or, spécialisée dans le domaine, Ferrovial figure sur la liste des 1230 EPE à privatiser. Son évaluation pour la cession ne devrait pas poser problème. Ferrovial bénéficie d'atouts non négligeables avec une réputation nationale et internationale acquise grâce à la qualité de ses produits.
Partenariats
Des résultats largement bénéficiaires militent en faveur d'une opération de partenariat. Au plan national, cette entreprise est intéressée par la réalisation de lignes à grande vitesse (Bordj-Khemis Miliana, Boumedfa-Djelfa, Touggourt-Hassi Messaoud), l'électrification de la Rocade nord et de la banlieue d'Alger, les 64 rames automotrices, le métro d'Alger, les tramways régionaux, la réalisation de la ligne ferroviaire Mecheria-Béchar. Au plan international, outre l'ambition de décrocher un marché syrien portant sur la fourniture de wagons et équipements ferroviaires, Ferrovial a soumissionné pour le projet libyen portant réalisation de 3000 kilomètres de rail. Pour les cadres gestionnaires de cette entreprise, le partenariat pourrait être la solution à un certain nombre de problèmes. Elle est reflétée dans la déclaration de M. Hamdi : « Le levier principal du développement n'est pas la ressource financière seule. Elle doit être accompagnée d'une expertise de qualité. Le transfert de savoir est d'autant plus important pour la partie algérienne que nous nous devons de développer des partenariats d'avenir solides et durables, d'apporter de la formation, des transferts de savoir-faire et d'accompagner l'Algérie dans son ouverture sur le monde. » Il s'agit d'une des conditions sine qua non avancées par les économistes algériens. Elle permettrait aux initiateurs de la privatisation d'éviter les erreurs du passé ne serait-ce qu'en raison de l'amélioration de la situation économique qui, selon eux, n'est plus ce qu'elle était durant les années 1990. De toute évidence, affirment nos interlocuteurs, c'est ce que souhaiteront les nouveaux actionnaires privés qui, demain, contrôleront les entreprises publiques. Depuis des mois, on s'affaire dans les coulisses des SGP à se redistribuer les cartes. Ce remue-ménage, affirme-t-on, se justifie par une inévitable valse des « patrons ». Qui accompagnera les privatisations. Bien que M. Temmar donne l'impression de vouloir travailler dans la transparence, la pression est énorme. Elle est matérialisée dans la déclaration faite à Paris par le ministre lorsqu'il affirme : « Le gouvernement a décidé de mettre en place une stratégie industrielle qui va fixer les secteurs prioritaires pour les investissements étrangers directs et pour l'investissement national. Cette stratégie devrait rétablir quelques priorités à tel ou tel secteur, accorder plus de facilité, plus d'aide, plus d'assistance pour que les opérations de privatisation et d'investissement s'opèrent plus facilement d'une manière flexible. » En économiste averti et en cadre gestionnaire de grande expérience, M. Hamdi apporte un plus à cette déclaration. Il a insisté sur le rôle incitatif de leadership que l'Etat algérien doit jouer dans le développement du système d'intelligence économique. Dans ce contexte, il préconise l'organisation de missions de formation au profit des opérateurs économiques et sociopolitiques aux défis et enjeux de la mondialisation/globalisation des échanges. Selon lui, le leadership devra développer une stratégie globale, afficher une volonté claire et surtout mobiliser les opérateurs économiques sur des priorités d'actions. Selon ce chercheur, la mondialisation implique la compétitivité, synonyme de performance, maîtrise des coûts, qualification et création de valeurs. D'autres économistes abondent dans le même sens tout en précisant que la rupture avec l'économie planifiée se jouera sur d'autres dossiers, comme celui de la lutte contre le chômage, la réduction des déficits sociaux, le financement des retraites.


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