Depuis cinq jours, la ville de Maghnia et toute la périphérie frontalière sont paralysées économiquement : les grossistes et les détaillants (ces derniers sous la contrainte) ont baissé rideau pour protester contre le nouvel arrêté ministériel soumettant les commerçants, introduisant leurs produits en direction de Maghnia, à une autorisation de circuler, un document appelé « passavant » qui est délivré par une brigade mixte composée des services des impôts, du commerce et des douanes. Une brigade stationnée provisoirement dans la commune de Hammam Boughrara (12 km de Maghnia), avant son installation définitive au carrefour dit 35 (axe Maghnia-Tlemcen-Oran). Cette décision est qualifiée d'inopinée et de discriminatoire par les gros commerçants de la région. « Pour qui nous prennent-ils ? D'abord, cette décision n'a pas été précédée d'une opération de sensibilisation, encore moins d'information. Et puis, politiquement parlant, en mettant en application cette décision uniquement pour la région de Maghnia, c'est de la pure discrimination. Pis, c'est du sectarisme rétrograde. Pourquoi ne l'a-t-on pas appliquée pour les autres régions frontalières du pays ? Que les décideurs d'en haut nous avancent un seul argument prouvant la justesse de leur décision et nous abdiquerons. parce que, pour éradiquer la contrebande, qu'ils le sachent, ce n'est certainement pas à coups de décisions... », s'interrogent des grossistes en alimentation générale. Et les conséquences de ce bras de fer n'ont pas tardé à faire des victimes : le consommateur qui se trouve, malgré lui, pris en otage. « pour un sachet de lait, nous attendons le livreur de Tlemcen (65 km). Quant au reste, nous puisons dans nos réserves. Ce n'est pas croyable, nous ne sommes pas loin du rationnement et les pouvoirs publics restent apathiques », s'inquiètent des citoyens. Ceux qui sont derrière cette grève, les grossistes se justifient : « Dans une semaine, si les choses restent telles quelles, tout l'extrême ouest sera une région morte, sans la moindre denrée alimentaire. Imaginez donc un peu la situation désastreuse qui attend cette région. Pour notre part, nous disons que c'est honteux que les frontières soient ramenées à 35 km en avant, oui c'est cela, comme si Maghnia n'était plus en territoire algérien. Nous ne sommes pas contre la loi, mais exiger de nous des factures et tout ce qui s'ensuit, alors que ceux qui nous approvisionnent à partir des grandes villes d'Algérie ne sont nullement inquiétés, ce n'est pas juste ni légal. » Un magistrat explique : « Tout commerçant ne disposant pas du fameux document, s'il est arrêté par les services de sécurité, est sévèrement sanctionné. Cela va de l'emprisonnement ferme, à la saisie de la marchandise et à une forte amende, c'est clair. » En tout état de cause, l'exigence du passavant pour les gros commerçants et la grève sauvage observée par ces derniers paralysent toute une région de plus de 150 000 habitants...